Un ex-officier de la DGSE dénonce l’acharnement contre l’Iran
Par R. Mahmoudi – S’exprimant ce jeudi sur les ondes de la Chaîne III de la Radio nationale, Alain Juillet, ancien directeur de renseignement à la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE) et président de l’Académie intelligence économique, s’est indigné contre la campagne d’acharnement occidentale contre l’Iran, en démontant notamment les principaux arguments avancés pour stigmatiser et abattre ce pays. «On ne peut pas accuser les Iraniens de terroristes, dira-t-il. Ce sont bien eux qui luttent, en Syrie, contre Al-Qaïda, Daech et le Front Al-Nosrah.»
Abordant l’accord nucléaire iranien, que les Etats-Unis cherchent aujourd’hui à remettre en cause, Alain Juillet parle d’une affaire de «poker menteur», tout en prévenant contre un éventuel recul sur cette question et contre la poursuite de cette campagne d’isolement qui cible l’Iran. «On ne peut continuer indéfiniment à marginaliser un grand pays comme l’Iran, et vouloir enfermer son peuple dans un blocus international», s’insurge cet ancien officier de la DGSE. Et de rappeler les engagements initiaux des puissances occidentales sur cet accord : «L’idée de régler le problème nucléaire (iranien, Ndlr) et d’ouvrir des échanges avec l’Iran a intéressé, au début, tous les pays. Seul Israël était, depuis le premier jour, contre cet accord.» Il fait remarquer que le revirement actuel des Etats-Unis sur la question sert d’abord les intérêts d’Israël. Mais, pour lui, les grandes puissances européennes doivent avoir une autre vision et continuer à défendre l’idée d’établir des relations avec un pays qui présente des intérêts.
Sur la crise syrienne, Alain Juillet s’est longuement exprimé sur la présumée attaque chimique dans la Ghouta orientale qui a suscité une vague d’indignation en Occident. D’entrée, il se dit persuadé qu’il y a eu des manipulations, à la fois sur les attaques et sur les enquêtes menées en Syrie. Pour lui, tout indique que certaines attaques «ont été faites par le régime (syrien, Ndlr), et que d’autres l’ont été par les opposants au régime». Il dit ne pas comprendre pourquoi les Occidentaux «ne disent rien quand il y a des soupçons sur les opposants». Selon lui, il y a visiblement une «non-neutralité des parties impliquées dans le conflit». Il dénonce ce deux poids, deux mesures des puissances occidentales qui condamne l’attaque d’Alep, parce que menée par Damas et son allié russe, et ferme les yeux sur l’attaque de Mossoul, faite par les Occidentaux. «Arrêtons de ne voir que les fautes commises par l’ennemi !» tonne-t-il.
A la question de savoir si les Occidentaux vont accepter de négocier avec le régime syrien, Alain Juillet trouve que c’est l’unique voie de salut. Il estime qu’il est évident que Bachar Al-Assad et les Russes ont repris le dessus sur le terrain et qu’ils ont repris l’essentiel des territoires. «Le vrai problème auquel seront confrontés les Occidentaux, poursuit-il, c’est l’après-guerre, c’est comment reconstruire le pays, comment faire pour le remettre en marche, et faire rentrer notamment les réfugiés qui constituent la force vive de ce pays, parce que la guerre est terminée.»
Selon cet ancien responsable de la DGSE, la solution au conflit syrien «ne se trouvera pas par la force, mais par la paix», même s’il est convaincu que dans la réalité de la géopolitique, «la morale n’est pas toujours évidente». C’est pourquoi, selon lui, il s’agit de trouver la solution «la moins mauvaise». Il considère, enfin, que tous les grands pays, y compris ceux du Maghreb, sont concernés par une solution à cette crise.
R. M.
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