Exclusif – Abolhassan Bani Sadr : «Les Saoudiens ont versé de l’argent à Israël»

Iran Sadr
L'ancien président iranien Abolhassan Bani Sadr. D. R.

L’ancien président iranien Abolhassan Bani Sadr, exilé en France depuis 1982, croit savoir que le ministre marocain des Affaires étrangères était à Téhéran un jour avant la déclaration par le Makhzen de la rupture des relations diplomatiques avec l’Iran. Selon lui, cette décision du Maroc pourrait faire partie d’un plan américano-israélien en quatre points, qui vise à fragiliser l’Iran mais pas à renverser le régime.

Algeriepatriotique : Une crise diplomatique vient d’éclater entre l’Iran et le Maroc. Quelle analyse en faites-vous ?

Abolhassan Bani Sadr : Les Iraniens vivent dans l’isolement depuis la prise d’otages qui a ciblé les membres du corps diplomatique américain en 1979. D’une part, c’est le régime qui, pour déstabiliser les autres, préfère l’isolement ; d’autre part, ce sont les autres qui œuvrent à isoler l’Iran et essaient de faire plier le régime. Ce sont ces deux facteurs intérieur et extérieur qui expliquent ce qui vient de se passer. Les Iraniens disent que le ministre marocain des Affaires étrangères était en Iran un jour avant la déclaration. Est-ce vrai ? Je ne sais pas. Dire que l’Iran a aidé les Sahraouis en les armant, je n’ai pas d’information à ce sujet non plus. Cependant, l’Iran a bel et bien aidé d’autres mouvements.

Je sais aussi que les Etats-Unis ont mis en place un plan discuté avec Benyamin Netanyahou et les Saoudiens. Parmi les éléments les plus importants de ce plan, l’intensification des sanctions économiques contre l’Iran et son isolement sur le plan international. Ce qui vient de se passer a-t-il un lien avec ce plan ? C’est à vous de chercher…

L’Iran subit des tirs croisés venant à la fois des puissances occidentales et des monarchies arabes. Une guerre est-elle possible ?

Une partie de ce plan consiste à menacer l’Iran par la guerre, notamment à travers une attaque israélienne. Même si Netanyahou vient de déclarer qu’il n’avait pas l’intention d’entrer en guerre avec l’Iran, le ministre américain de la Défense a affirmé, lors de sa visite à Tel-Aviv, qu’il prévoyait une guerre entre l’Iran et Israël. Un conflit armé entre l’Iran et Israël constitue le troisième élément du plan américain. Le quatrième consiste à renverser le régime de l’intérieur.

Les Etats-Unis menacent de se retirer de l’accord nucléaire. Qu’est-ce que cela présage-t-il ?

Non seulement Trump a réussi à empêcher les firmes étrangères d’investir dans l’économie iranienne – de nombreuses banques mondiales ont refusé des transactions financières avec l’Iran – mais il a poussé même des investisseurs installés en Iran à quitter le pays. En un seul mois (mars), trente milliards de dollars ont été sortis d’Iran, selon le régime.

Je pense que Trump exécutera au moins deux des éléments contenus dans le plan américain. Certains disent qu’il va sortir de cet accord (nucléaire) et d’autres disent que non. Peut-être qu’il en sortira, mais il ne rétablira pas les sanctions contre l’Iran. Il laissera les Européens faire pression sur le régime de Téhéran pour qu’il accepte de nouvelles négociations.

Trump vise trois objectifs : empêcher l’Iran d’avoir la bombe atomique, lui interdire de se doter de missiles balistiques et limiter son influence dans la région.

Le régime des mollahs résiste malgré toutes les tentatives visant à le renverser. D’où puise-t-il sa puissance ?

Le régime des mollahs subit des pressions permanentes de l’extérieur. C’est un régime qui vit dans la crise depuis l’affaire des otages jusqu’à aujourd’hui. Le peuple iranien a vécu une série de crises. Celle des otages américains, donc, puis celle induite par la guerre avec l’Otan et, maintenant, il y a cette crise provoquée par le nucléaire iranien. Le régime profite de ces crises pour se maintenir au pouvoir. Toutes ces menaces extérieures le renforcent. Je pense que les Américains le savent très bien et ils ne veulent pas, au fond, que ce régime parte. Bien au contraire. Les Etats-Unis veulent qu’il reste tout en l’affaiblissant car c’est cela qui permet, comme vient de l’avouer Trump, de faire payer les pays arabes. Les Saoudiens sont les troisièmes plus gros acheteurs d’armes au monde. Vous imaginez-vous ce que cela veut dire ? Où tout cet argent va-t-il ? Dans les caisses des fabricants d’armes américains bien entendu ! Trump vient de déclarer que pour assurer leur protection, les Arabes devront payer. Le régime iranien convient très bien aux intérêts des Américains dans la région.

L’Arabie Saoudite se rapproche de plus en plus d’Israël. Qu’est-ce qui explique se changement de cap ?

Les Saoudiens ont accordé vingt-six milliards de dollars aux Israéliens. Ce n’est pas un simple rapprochement. Mohamed Ben Salmane a affirmé récemment que les Saoudiens avaient des intérêts communs avec les Israéliens. Quels sont donc ces «intérêts communs» qui existeraient entre des pays arabes et l’Etat d’Israël qui continue de bafouer les droits des Palestiniens ? A moins qu’ils partagent un intérêt commun contre l’Iran…

Quel commentaire faites-vous au sujet du manifeste contre le nouvel antisémitisme signé par 300 personnalités françaises ?

Je  considère que ce manifeste fait partie de la même propagande qui est mise en branle chaque fois que les Israéliens massacrent les Palestiniens.

Propos recueillis par Mohamed El-Ghazi

Comment (6)

    DAHMANE
    6 mai 2018 - 18 h 00 min

    Le plus simple pour nous, il faut boycotté le hadj et la omra…jusqu’a nouvel ordre, celui qui veut avoir le merite d’une hadja, il peut voir autour de lui un jeune deminu pour l’aider a se marier ou a construire ..welah c mieux que d’aller faire une hadja (jusqu’a ce que l’arabie yahoudite cesse de gerer le hadj et la omra) donc une reflexion est exigée pour prendre en charge le hadj par tous les musulmans du monde..du moment que les lieux saints appartiennent a tous les musulmans pas uniquement a ma3chara koreich.

    Anonyme
    6 mai 2018 - 12 h 29 min

    Les saoudiens sont chez nous.
    Des pancartes en arabe ( citations- religieuse) ont été placées tout au long de la route JIJEL BEJAIA.
    Des citations wahhabo-Sallfistes ont remplacées le code de la route .
    C’est quoi ce pays qui n’a ni règle ni loi. Dans ce cas, n’importe qui peut écrire des pancartes selon ses convictiones et les mettre au long de n’importe quelle route.
    La religion est manipulée en Algérie. La chaine des salafistes, Ennahar, trouve que c’est une bonne initiative.(????).

      B'JAOUIAS
      6 mai 2018 - 15 h 17 min

      C’est une propagande de DAACH qui a su masquer l’objectif de ces pancartes.
      Nous exigeons que ces pancartes soient retirées et qu’elles soient remplacées par le code de la route. STOP à la manipulation de la religion.

      Abbou
      6 mai 2018 - 16 h 00 min

      Votre observation n’a aucun sens. L’islam n’appartient pas à l’Arabie saoudite. C’est également un des référents constitutionnels de l’Algérie. Et le peuple algérien ne va pas apostasier parce qu’il n’est pas content de la politique étrangère de l’Arabie.

        Mme CH
        6 mai 2018 - 22 h 08 min

        Bien dit Si Abbou, il ne faut pas emmêler les pinceaux et profiter de la conjoncture actuelle pour dislamiser la population..! L’Algérie est sunnite Malékite, alors préservons ce précieux héritage, tout en restant ouverts sur la science, la technologie et toutes les bonnes choses des autres civilisations…! Car pour le moment, nous faisons dans le mimétisme et le Toubbe3isme négatifs…!

        Les Al Sa3ouds sont des traîtres depuis la nuit des temps. Donc, ils ne doivent pas être un modèle pour les musulmans..!
        « Après le déclenchement de la Première Guerre mondiale, Ibn Saoud se rapproche graduellement des Britanniques. Le Traité de Daraïn, signé le 26 décembre 1915 avecPercy Cox, au nom du Bureau de l’Inde, lui accorde protection, armes et subsides en échange d’une non-agression contre leurs protectorats de Koweït, du Qatar et des États de la Trève.  »
        « Le 2 novembre 1925, les Al Saoud et les Britanniques signent le traité de Hadda, destiné à délimiter les frontières entre le domaine des Saoud et la toute nouvelle Transjordanie. »
        « La dernière grande conquête a lieu en 1926 avec la prise de l’Asir, du Jizan et du Najran, régions historiquement yéménites. »

        « Des légations soviétiques (le 16 février) et britanniques ouvrent à Djeddah en 1926. »
        « La même année, Abdelaziz se proclame roi du Hedjaz. Il est reconnu roi du Hedjaz, du Nejd et de leurs dépendances en janvier 1927. »

        « Le 20 mai 1927, avec l’aide de St. John Philby, Abdelaziz signe avec les Britanniques le traité de Djeddah par lequel il renonce à toute extension du territoire saoudien au détriment des souverains protégés par Londres tandis que les Britanniques reconnaissent le statu quo. »

    socrate
    6 mai 2018 - 9 h 49 min

    Donald Trump nous fait son Georges Bush junior ! Comme quoi, les leçons de l’Irak n’ont toujours pas été tirées aux USA qui vont être, une nouvelle fois, entrainés dans une guerre sans fin au Moyen-Orient. Comme l’Iran est une puissance beaucoup plus grande que l’Irak, cela promet d’être sanglant, couteux et interminable …

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