Grève des résidents : un «plan B» éreintant pour les professeurs et les maîtres-assistants à Constantine
Considérés comme étant l’épine dorsale du système hospitalier, les médecins résidents, en rupture de ban, maintiennent le cap à Constantine, obligeant l’administration à recourir à un »plan B » en sonnant la mobilisation de leurs « ainés » qui replongent dans le rythme des gardes itératives et éreintantes.
Dans la quasi-majorité des services, médecins chefs, professeurs, maîtres assistants et paramédicaux doivent ainsi faire face à une pression accrue depuis que les résidents ont cessé d’assurer les gardes. Une pression qui impacte les malades dont certains, rencontrés au centre hospitalo-universitaire Dr Benbadis de Constantine (CHUC), n’ont pas manqué de fulminer contre la grève des résidents qui «perturbe la prise en charge des patients, les consultations et le rythme général des activités au sein de l’hôpital», ont-ils soutenu.
Accompagnant de son père, souffrant d’hypertension artérielle, Adra a fait part à l’APS du profond malaise que cette situation génère chez les malades, «otages d’une grève dont on ne voit plus la fin», qualifiant les patients de «victimes collatérales» de ce statu quo.
Afin de remédier à cela, maîtres assistants, professeurs, assistants de santé publique et généralistes dépêchés des établissements publics de santé de proximité (EPSP) sont désormais en première ligne pour parer à la défection des résidents grévistes qui n’assurent plus de service minimum.
«Les résidents n’ayant pas répondu aux réquisitions ordonnées par le ministère de la Santé en vue de garantir la continuité des soins et la prise en charge des malades, ce sont les professeurs, les maîtres assistants et les assistants de santé publique qui assurent à présent les gardes», a affirmé Karima Benahcene, directrice des activités pédagogiques et médicales (DAPM) au CHU de Constantine.
Saluant les efforts consentis par les «seniors» auxquels ont été associés les médecins généralistes chargés de faire le tri des malades, Mme Benahcene a indiqué que «si tous les services sont touchés par la grève, c’est essentiellement les services de gynécologie, de cardiologie et les urgences qui sont le plus impactés».
Faisant état de 1 361 résidents répartis sur les différents services du CHU Benbadis, dont 80% sont en grève, cette même responsable a avoué que «la charge est énorme, mais les seniors arrivent à assumer de manière remarquable».
Concernant le service d’oncologie, notamment, où affluent chaque jour des dizaines de patients venus de différentes wilayas de l’Est, l’activité n’a pas été troublée par la grève des résidents car, justifie-t-elle, «le personnel médical y est nombreux».
1 900 consultations aux urgences en avril
Médecin chef du service des urgences chirurgicales, Pr Ali Belmir a reconnu, quant à lui, que le manque d’effectif engendré par la grève des résidents a «une incidence sur l’activité du service», attestant que le personnel médical du service fait tout son possible pour assurer la prise en charge des malades dans un service aussi névralgique.
Pr Belmir a également avancé le nombre de 1 900 consultations et 535 hospitalisations au cours du mois d’avril 2018, tout en mettant en exergue le fait qu’il y a actuellement «moins d’évacuations de patients des wilayas limitrophes».
S’agissant des gardes de nuit, il précise que celles-ci sont actuellement assurées par les «aînés», à savoir les maîtres assistants et les maîtres de conférence de classe A, notamment pour pallier l’absence des résidents grévistes.
Néanmoins, quand bien même les nombreux patients, qui attendaient d’être examinés, affichaient un calme relatif et une patience corrélative, «les choses ne sont pas toujours aisées dans ce service où certains malades font parfois preuve d’agressivité envers le personnel médical en cas de lenteur dans la prise en charge», a-t-on indiqué.
De son côté, Dr Abdelmoumen Hadibi, résident en radiologie et membre du bureau national du collectif autonome des médecins résidents algériens (Camra), a indiqué que le débrayage des résidents est encore «très suivi» et qu’il n’y a, pour l’instant, «qu’environ une trentaine de non-grévistes au CHU Ben Badis».
Précisant que les services «sensibles» enregistrent un taux de suivi de 100%, à l’instar des services de cardiologie, gynécologie, orthopédie, neurochirurgie, urgences et réanimation, Dr Hadibi a qualifié les réquisitions des médecins résidents ordonnées par le ministère de tutelle d’«illégales».
Il a soutenu, à ce propos, que «les médecins résidents ne sont ni des travailleurs ni des fonctionnaires pour être réquisitionnés», faisant part de la détermination de ses pairs à maintenir leur grève jusqu’à ce que les autorités concernées émettent des propositions à même de satisfaire leurs revendications.
R. N.
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