Débat en danger
Par R. Mahmoudi – Des appels au boycott de certains produits et, récemment encore, de certains documents administratifs, aux demandes d’annulation de concerts de musique jugés «attentatoires à la morale», en passant par cette campagne féroce et débridée contre la personne du Premier ministre, Ahmed Ouyahia, le débat public dans notre pays tend à sortir du cadre institutionnel et organisé et à s’enfermer dangereusement dans l’espace virtuel des réseaux sociaux.
D’aucuns diront que cette tendance est en soi un signe que les institutions (étatiques, partisanes, associatives…) ne jouent plus leur rôle et qu’elles sont définitivement dépassées par les nouvelles réalités de la société. Aujourd’hui, des leaders d’opinion et des militants politiques préfèrent intervenir à travers des pages anonymes sur Facebook que dans des conférences ou des actions publiques qui ne sont plus suivies et n’ont plus d’impact sur l’opinion. Or, ils ne sont pas sans savoir que ce recours abusif aux réseaux sociaux est souvent porteur de dérives qui, au final, ne profitent qu’aux plus aventuriers, aux plus extrémistes qui ont l’habitude de nager dans les eaux troubles.
Beaucoup d’indices montrent, en effet, que les plus actifs dans cette offensive cybernétique sont, comme d’habitude, les islamistes. Les formules choc, les jeux de la victimisation accompagnés d’appels à la sédition («Un peuple qui a donné un million et demi de martyrs peut-il accepter de payer sa carté d’identité !») et de la moralisation (contre une soirée musicale avec des chanteurs «homosexuels») portent bien leur empreinte. Le succès que reçoivent toutes ces campagnes prouve que les cyberactivistes islamistes gardent encore une capacité de nuisance non négligeable qui peut servir, dans le flou qui entoure les futures échéances électorales, bien des calculs.
R. M.
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