Ould-Kaddour à propos de la raffinerie d’Augusta : «Je sais ce que je fais !»
Par Hani Abdi – Le PDG de Sonatrach continue de défendre son choix de racheter la raffinerie d’Augusta en Italie, malgré les mises en garde de plusieurs experts. Dans un entretien accordé au Quotidien d’Oran, Abdelmoumen Ould-Kaddour répond avec dédain et prétention à ceux qui l’ont appelé à se rétracter tant que c’est possible et ne pas finaliser la transaction de rachat avec ExxonMobil. «Mais de quoi se mêlent-ils ?», répond Ould-Kaddour à la journaliste qui l’interrogeait sur les problèmes d’environnement que poserait cette raffinerie à Sonatrach. «J’ai passé 25 ans à étudier, je suis diplômé en génie chimique de l’Ecole nationale polytechnique d’Alger, j’ai fait MIT (Massachussets Institut of Technology), Harvard University (…). Avec toutes les écoles que j’ai fréquentées, on vient me dire aujourd’hui n’achetez pas ! De quoi se mêlent les étrangers ? (…) On est des professionnels !», a-t-il martelé, visiblement agacé par les reproches de spécialistes qui ont décortiqué cette raffinerie et sérié tous les problèmes qu’elle connaît.
Ould-Kaddour poursuit en prenant comme ligne de défense l’urgence de réduire les importations des produits pétroliers raffinés. «Je trouve bizarre que personne ne se demande pourquoi Sonatrach n’a-t-elle pas de présence importante à l’international ou par exemple ne fait pas de raffinage…», a-t-il lâché, précisant que «Sonatrach a importé de 2011 à ce jour plus de 16 milliards de dollars de produits raffinés». «On achète pour deux milliards de dollars par an de carburants. Jusqu’à quand !», a-t-il lancé, estimant que si l’Algérie a préféré importer que raffiner, c’est tout simplement parce qu’il n’y avait pas un responsable comme lui qui avait le courage de prendre la décision de raffiner en Algérie.
Abdelmoumen Ould-Kaddour justifie donc cette acquisition controversée en Italie par sa franche volonté d’«inverser l’équation le plus rapidement possible». Par sa réponse, il s’adresse notamment à Hocine-Nasser Bouabsa, ex-directeur général de Schlumberger North Africa, qui a appelé dans une tribune publiée sur Algeriepatriotique à renoncer à l’acquisition de la raffinerie d’Augusta. Son analyse très pointue a fait l’effet d’une bombe.
Autre sujet sur lequel il s’est défendu : l’affaire Brown and Root Condor (BRC), une joint-venture entre Sonatrach (51%) et Halliburton (49%). Une affaire dans laquelle il a été condamné en 2007 à 30 mois de prison ferme pour «divulgation d’informations classées secret défense». Une peine qu’il n’a pas totalement purgée puisqu’il a quitté la prison en mars 2009 après avoir bénéficié d’une liberté conditionnelle. «J’ai passé deux ans de prison à Blida, chez les militaires, j’ai été condamné officiellement à 30 mois de prison ferme, mais avant de les terminer, on est venu me dire tu sors, j’ai refusé, j’ai demandé pourquoi vous m’avez mis en prison et pourquoi vous voulez que je sorte aujourd’hui ?», raconte-t-il à la journaliste, avant d’accuser les autorités militaires de l’avoir mis en prison sans «papier». «On m’a sorti de prison comme on m’a fait entrer, sans aucun papier, sans aucun dossier», affirme-t-il, vantant les réalisations de BRC comme le Centre de criminologie de Bouchouaoui, le siège du ministère de l’Energie, les hôpitaux d’Oran et de Constantine et le centre d’expertise et des grands brûlés d’Aïn Naâdja.
Ould-Kaddour nie l’existence de retards de réalisation ou de surcoûts. Il considère que l’affaire BRC «a été diligentée pour casser Chakib Khelil». Pourquoi vouloir casser Khelil ? «Chakib Khelil n’a jamais accepté que le DRS s’implique dans la gestion des entreprises affiliées à Sonatrach, encore moins dans son ministère». M. Ould-Kaddour n’a pas donné des explications sur l’opacité qui entourait les activités de BRC, qui avait d’ailleurs poussé le président Bouteflika à exiger la dissolution de cette société mixte en janvier 2007. Jamais BRC n’avait présenté de bilan de ses treize années d’activité intense en Algérie, touchant à la fois à l’énergie et à d’autres domaines, comme la défense nationale.
H. A.
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