Des députés européens dénoncent des tentatives de contourner la décision de la CJUE
Des députés européens, membres de la commission «Commerce international» (INTA) au Parlement européen ont dénoncé, jeudi, la proposition de la Commission européenne de modifier l’accord d’association UE-Maroc pour inclure les produits du Sahara Occidental, jugeant celle-ci non conforme à l’arrêt de la Cour européenne de justice rendu en décembre 2016.
Lors d’un débat au sein de cette commission sur la proposition de l’exécutif européen, l’eurodéputé Florent Marcellesi a ironisé sur les «prouesses techniques» de la Commission qui passe avec le Maroc un accord incluant le Sahara Occidental sans avoir mis les pieds sur ce territoire.
Ce député européen a relevé, à l’occasion, les «nombreuses contradictions» de la Commission européenne qui reconnaît le statut «séparé» et «distinct» du Sahara Occidental mais conclut avec Rabat un accord qui inclut ce territoire sans y avoir jamais mis les pieds.
Florent Marcellesi a souligné également la démarche «totalement contradictoire» de la Commission qui ne reconnaît pas au Maroc de souveraineté sur le Sahara Occidental, mais consulte les autorités marocaines dans le cadre des négociations pour inclure les produits du Sahara Occidental dans les accords commerciaux UE-Maroc.
Il a dénoncé, en outre, l’attitude de la Commission vis-à-vis du représentant légitime du peuple du Sahara Occidental, le Front Polisario, affirmant que l’appui apporté par l’UE à la «force occupante» va à l’encontre des recommandations de l’envoyé personnel du secrétaire général des Nations unies au Sahara Occidental, Horst Kohler, qui avait insisté sur l’importance de valoriser le rôle du Front Polisario.
L’eurodéputé Florent Marcellesi a réfuté, par ailleurs, les allégations de la Commission européenne qui soutient que le peuple du Sahara Occidental bénéficiera de l’inclusion de ce territoire dans les accords UE-Maroc, réitérant son soutien à la proposition de demander l’avis de la Cour européenne de justice (CJUE).
La députée européenne Jytte Guteland a estimé, de son côté, que l’inclusion du Sahara Occidental dans les accords UE-Maroc «nuira» au processus de paix onusien et «compromettra» les chances de parvenir à un accord qui mettra fin au conflit.
L’eurodéputée, qui a exprimé son inquiétude face à la proposition de la Commission, a affirmé également que celle-ci «créera plus d’insécurité pour les entreprises européennes», dénonçant l’approche de la Commission européenne lors des consultations.
«Comment la Commission peut-elle prétendre avoir consulté le peuple du Sahara Occidental, alors que les nombreux Sahraouis vivant dans les camps des réfugiés ne se sont pas exprimés sur la question ?» s’est-elle interrogée.
Klaus Buchner a dénoncé, pour sa part, la terminologie utilisée par la Commission européenne qui tend à confondre, délibérément, le «peuple du Sahara Occidental» avec la «population sahraouie» dans le processus de consultation pour obtenir le consentement nécessaire à l’inclusion du Sahara Occidental dans les accords UE-Maroc.
Selon cet eurodéputé, la Commission ne peut prétendre avoir obtenu ce consentement alors que plus de 90 ONGs sahraouies ont refusé de prendre part au processus de consultation et que les associations qui ont participé à ce processus ne sont pas représentatives du peuple du Sahara Occidental. «Nous sommes (Européens) en train de fouler aux pieds nos principes les plus sacrés pour des intérêts économiques», a-t-il regretté.
Le député européen Helmut Scholz a déploré l’insistance de la Commission européenne à conclure un accord qui couvre le Sahara Occidental au lieu de se contenter d’un accord limité au territoire, internationalement reconnu, du Maroc.
L’eurodéputée Anne-Marie Mineur a réitéré sa demande pour l’obtention d’un avis de la CJUE par rapport au processus de consultation mené par la Commission européenne et à sa proposition d’amendement de l’accord d’association UE-Maroc pour inclure les produits du Sahara Occidental.
Le président de la Commission INTA, Bernd Lange, a annoncé, pour sa part, l’organisation prochaine d’une mission parlementaire d’information au Maroc et au Sahara Occidental.
R. I.
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