De l’éducation en Algérie
Par Nasser Chali – Selon le dictionnaire Larousse, l’éducation est la formation de quelqu’un dans tel ou tel domaine d’activité. C’est aussi un ensemble de connaissances intellectuelles, culturelles et morales acquises par quelqu’un ou un groupe.
Est-ce que l’école algérienne est à même de répondre à cette exigence ? Vu les statistiques du classement des écoles à travers le monde, notre école est à la traîne, selon l’Unesco(1). Elle figure en effet à la 119e place mondiale sur 140 pays en matière de qualité de l’enseignement. Le Maroc est à la 84e place, la Tunisie à la 100e place. De quoi perdre le souffle vu que les moyens financiers dépassent largement ceux de nos voisins. Cela ne va pas sans incidence sur le développement.
Je suis convaincu qu’un système d’éducation inefficace produit, à long terme, une arriération dans tous les domaines, comme le souligne la citation suivante(2) : «Le développement d’un pays, sa compétitivité économique, sa maîtrise technologique, sa production scientifique, sa capacité de créativité et d’innovation, son rayonnement culturel et littéraire sont en étroite collaboration avec le système éducatif mis en place.»
La célèbre formule «quand le bâtiment va, tout va» pourrait aisément s’appliquer ainsi : quand l’éducation va bien, le reste va bien aussi. Edgar Morin(3) résume ainsi les trois missions de l’éducation :
- anthropologique : développer le meilleur de l’être humain car celui-ci est capable du meilleur comme du pire ;
- civique : l’être humain doit s’intégrer dans sa société et doit conquérir sa place par l’abnégation et le mérite ;
- nationale : l’être humain doit améliorer la qualité de sa vie et de la pensée de la nation.
L’école contribue donc à la construction de soi et à une adhésion apaisée à un espace national donné. Elle est ce fameux sanctuaire qui nous ouvre les yeux sur les connaissances, les expériences et les choses nouvelles qui nous émerveillent. Rousseau disait : «Il faut apprendre à vivre, c’est-à-dire se préparer aux difficultés de la vie, à ses imprévus et à ses incertitudes.»
Est-ce que notre école est préparée aux rigueurs du XXIe siècle, où l’on s’attend à des bouleversements fréquents dans les domaines des sciences de l’information, de l’innovation et du tout-informatique ? Je vous laisse le soin de répondre. Sommes-nous encore dans l’enseignement classique qui comprend l’élève, le professeur, le tableau et les devoirs ? Doit-on initier l’élève à la recherche personnelle, aux visites à l’extérieur pour éveiller en lui le désir d’apprendre de nouvelles choses, de s’ouvrir sur l’extérieur et de chercher sa propre autonomie dans sa formation ?
De la réussite finlandaise(4)
Nous devons nous inspirer de l’école finlandaise, première de la classe en Occident. Chaque année, une cinquantaine de délégations étrangères, dont des chinoises, se bousculent dans ce pays pour s’imprégner de la réussite de son école. Dernièrement, les pays asiatiques comme la Corée du Sud et Singapour ont devancé la Finlande. Voici quelques points qui justifient la réussite de ce pays scandinave :
- une formation rigoureuse des enseignants. Les facultés d’éducation reçoivent les meilleurs enfants du pays.
- Le ministère impose le contenu des cours mais les professeurs sont libres de choisir leurs méthodes de travail.
- Développement du jeu pendant la recréation qui renforce la concentration de l’enfant pendant les cours.
- Soutien aux enfants défavorisés.
- Le secret de la réussite finlandaise est aussi la prévention. Si les résultats baissent, les professeurs se consultent, appellent les parents et font intervenir un spécialiste si besoin est. Au Canada, des lycées qui ouvrent pendant les vacances pour les enfants en difficulté.
- Les écoles finlandaises offrent même des cours aux enfants étrangers dans leurs langues maternelles afin que leur développement cognitif ne soit pas freiné. Au pays, les voix de l’ignorance et de l’inconscience se lèvent rapidement quand on parle de l’enseignement de tamazight.
Notre souci n’est pas d’égaler La Finlande car beaucoup de choses nous différencient, malgré cela, nous devons nous inspirer de leurs méthodes et appliquer ce qui est applicable. Il y a sûrement des moyens de développer notre école sans recourir à des cours privés qui hypothèquent considérablement l’égalité des chances déjà fort contrariée par l’inégalité des revenus. Il faut rendre l’école attractive car l’enfant qui se sent bien à l’école, sera plus concentré sur les cours.
Une école qu’on ouvre n’est pas seulement une prison qu’on ferme, mais une jeunesse heureuse qui aimera son pays et relèvera les défis de demain.
Quand l’école va bien, tout le reste suit. C’est une question de temps.
N. C. (Toronto, Canada)
Dernier livre paru : L’Apatride (éditions L’Harmattan, janvier 2018)
Sources :
1 – Statistiques de l’Unesco 2017
2 – Journal Le Matin du 5 août 2015
3 – Edgar Morin dans la revue Sciences humaines de janvier 2018
4 – Mauricio Segura , le10 avril 2014, Education : la Finlande, première de la classe
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