La guerre du gaz déclarée à l’Algérie par l’Espagne et les Etats-Unis ?
Par Sadek Sahraoui – L’Espagne mène actuellement un intense lobbying afin de convaincre ses partenaires européens de connecter la péninsule ibérique au réseau européen de gazoducs. Madrid caresse, en effet, le rêve de transformer l’Espagne en une gigantesque plateforme de transit des importations de gaz américain. Le pays joue sur le fait qu’il possède de nombreux terminaux méthaniers et que son projet peut contribuer à sécuriser les approvisionnements en gaz de l’Europe.
Le projet espagnol a-t-il reçu le soutien de Washington ? Pour le moment, il n’y a pas d’éléments concrets qui peuvent nous permettre de répondre clairement par l’affirmative à la question. Mais il est certain que les Américains ne s’y opposeront pas puisqu’ils ont tout à y gagner, surtout qu’ils se sont promis de contrer l’influence russe en Europe. Et pour Washington, cette guerre d’influence passe nécessairement par une réduction de la dépendance européenne vis-à-vis du gaz russe.
Le premier acte de cette guerre du gaz vient d’ailleurs de se jouer à Washington où vient de se rendre le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker. Selon la presse américaine, le responsable européen a promis à Donald Trump une augmentation des importations de gaz naturel américain liquéfié. Les Européens «vont devenir des acheteurs majeurs», a-t-il affirmé. Il faut s’attendre donc à ce que l’Europe soit bientôt inondée en gaz américain. Et elle devrait l’être davantage si, effectivement, l’Espagne venait à être raccordée au reste du Vieux-Continent.
De leur côté, les Russes ne resteront pas les bras croisés. Il est certain que Vladimir Poutine se battra farouchement pour garder intactes les parts de marché de son pays. Et cela quitte à casser les prix, ce que la Russie peut se permettre.
La question qui se pose maintenant est de savoir si cette guerre du gaz qui inclut également le Qatar (Doha fournit déjà à l’UE 6% de ses besoins en gaz naturel liquéfié) va impacter ou non les exportations algériennes de gaz en direction de l’Europe. La question est des plus lancinantes dans la mesure où la vente de gaz et de pétrole constitue, malheureusement encore, l’essentiel des rentrées en devises du pays et les Européens sont nos principaux acheteurs. Nous devons vite savoir de quoi il en retourne exactement car, contrairement à la Russie, l’Algérie ne peut pas se permettre de brader son gaz.
S. S.
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