Salmanegate ?
Par Akram Chorfi – Quand on considère les qualificatifs(*) par lesquels la rue virtuelle arabe évoque l’Arabie Saoudite depuis que ce royaume a ouvertement annoncé ses positions politiques pro-israéliennes, on ne peut que comprendre le revirement qui a aujourd’hui lieu, auquel d’ailleurs même les Etats-Unis et Israël ne pourraient que souscrire s’ils veulent avoir un allié stratégique intact politiquement dans quelques années.
En donnant la main aux Etats-Unis et à Israël sur le dossier palestinien, l’Arabie Saoudite n’avait-elle pas conscience qu’elle s’ouvrait une ligne de feu à sens unique dont elle allait être la cible de façon pérenne ? La rue arabe – y compris celle maghrébine amazighe – a vomis son dégoût, des semaines durant, et rien ne dit, aujourd’hui, bien que les Saoudiens se soient ressaisis, que cette perception de traîtrise s’efface un jour, si tant est que ce ressaisissement soit vrai.
En fait, toute relation avec Israël, en dehors de la sphère panarabe où sont pris en compte les intérêts de la Palestine et ses droits historiques, est perçu par la rue arabe comme un acte de traîtrise, et ce malgré la complicité et la complaisance de certains dirigeants arabes, tentés, sans coup férir, de voir ainsi tâter le pouls des peuples de la région pour éprouver leur niveau d’attachement à la Palestine.
En impliquant l’Arabie Saoudite de façon aussi indigne dans la promotion de son plan de paix du siècle qui ne favorise que l’Etat sioniste, Trump risquait de faire perdre aux Arabes tous leurs repères religieux, El-Qods et La Mecque. Pis encore, Trump, en achevant de discréditer toute autorité de l’Arabie Saoudite sur elle-même et en menant ce royaume à la baguette, pointait au monde musulman la seule et unique alternative : l’Iran et le chiisme triomphants qui n’ont jamais, à ce jour, fléchi devant l’ogre israélien.
A l’évidence, ce scénario du refus saoudien, dont l’authenticité, si elle s’avérait, serait un fait historique révolutionnaire, ne pourra que préserver le royaume saoudien contre la rue arabe et contre le front interne, de plus en plus important, que ses compromissions sont en train de faire naître.
A. C.
(*) «L’Arabie yehoudite», «khadimou al-haramiyayne» (le serviteur des deux bandits, en parlant de Trump et Netanyahu), et d’autres encore très peu flatteurs.
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