Saïd Sadi : «Le système militaro-policier veut se relancer au nom de Abane»
Par Hani Abdi − Saïd Sadi a vivement dénoncé le fait de baptiser une caserne au nom de Abane Ramdane.
Dans une conférence-débat animée à Akfadou sur le Congrès de la Soummam, le fondateur du RCD estime que par cette décision on cherche à relancer un système autoritaire à bout de souffle. «Le chef de l’état-major de l’Armée, Gaïd Salah, a décidé de donner le nom de Abane Ramdane à une annexe de l’Académie militaire de Cherchell. Ils l’ont tué, enterré, occulté, de son vivant et après sa mort ils n’ont pas donné son nom à une université, un institut, un opéra. Ils le donnent à une caserne, lui qui a toujours dit que le militaire ne doit être rien d’autre qu’un moyen pour prolonger la réflexion pour l’accès à l’Indépendance», dénonce Saïd Sadi pour lequel «c’est comme ils l’ont assassiné une seconde fois».
L’ancien président du RCD et deux fois candidat à l’élection présidentielle (1995 et 2004) assure que cela a été fait à desseins politiques. Pour lui, baptiser une caserne au nom de Abane a été fait «au moment où l’armée se prépare à organiser une opération pour relancer un système militaro-policier au nom d’Abane Ramdane». «Il n’y a pas une catastrophe pire que celle-ci», poursuit Saïd Sadi qui est revenu longuement sur le Congrès de la Soummam et les leçons qu’il faudra retenir de ce grand évènement de la Révolution algérienne.
Pour lui, l’esprit de la Soummam est celui du débat et de la construction démocratique. Il relève que tout le monde n’était pas d’accord au Congrès de la Soummam qui a duré un mois. Mais les congressistes ont réussi à s’entendre sur l’essentiel afin de sauver la Révolution et donc baliser la voie de l’Indépendance de l’Algérie.
«La plate-forme de la Soummam n’est certes pas une recette à appliquer mais c’est une immense leçon qui peut nous enseigner pourquoi est-ce que le seul projet démocratique national n’a jamais abouti et qui peut nous enseigner d’où peuvent venir les coups et quelles sont les erreurs à éviter», affirme Saïd Sadi, pour qui cette plate-forme doit être davantage débattue.
Le fondateur du RCD souligne dans la même conférence que Abane Ramdane était un nationaliste qui a su placer l’intérêt de la Révolution au-dessus de tout, mais aussi un visionnaire qui a pu anticiper les dangers à venir après l’Indépendance.
«La question identitaire a été occultée lors du Congrès de la Soummam. Abane qui avait compris que le panarabisme était une chimère, des discours, des bavardages et des élucubrations sans lendemain, n’a pas pu assumer la crise identitaire. Abane était un jacobin, centraliste qui était convaincu qu’il fallait construire une nation moderne, rigoureuse, structurée et bien articulée. L’idée de la question identitaire n’était pas une grande préoccupation pour lui», assure Saïd Sadi qui estime que la plateforme de la Soummam est toujours d’une grande actualité.
Saïd Sadi considère que l’Indépendance a été confisquée par des gens étrangers à la guerre de Libération nationale. Il évoque le cas de Boumediène qui «a pris le pouvoir par la force alors qu’il n’avait pas tiré une balle pendant la Révolution».
Pour lui, on peut comprendre les maux de l’Algérie et décrypter ses problèmes en revisitant l’histoire et en analysant profondément la Congrès de la Soummam et ses résolutions.
H. A.
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