Les médias marocains fantasment sur les changements opérés dans l’armée
Par Karim B. – Les médias marocains se sont emparés des derniers changements opérés au sein de l’Armée nationale populaire (ANP), mêlant analyses calquées et fantasmes.
Les canaux du Makhzen, pour lesquels ces mises à la retraite de généraux «soulèvent de nombreuses interrogations», ironisent en qualifiant ces changements de «forte diarrhée» qui a concerné «des centres sensibles au sein de l’Etat» et en parlant de «victimes d’un feuilleton» qui «va continuer».
Les médias marocains expliquent ce mouvement par un «désaccord entre la classe politique et l’institution militaire sur la succession au président Bouteflika sur fond de crise non déclarée à laquelle ces deux acteurs n’arrivent pas à trouver une issue». Ces médias se réfèrent à des «centres de décision internationaux» qui auraient «cité de nombreux noms pour succéder à Bouteflika, au premier rang desquels le chef d’état-major de l’armée».
Pour les médias marocains, deux hypothèses peuvent expliquer les changements opérés au sein de l’institution militaire. La première voudrait que l’armée se prépare à des «secousses» en cas d’«échec de la période de transition après le départ de Bouteflika en écartant les hauts gradés liés au mandat de l’actuel président». Les médias marocains y voient, en effet, une «tentative de légitimation du rôle de l’armée dans le transfert du pouvoir». La seconde est liée au «scandale de la cocaïne», lit-on encore dans plusieurs journaux et sites marocains, qui évoquent une «guerre larvée entre plusieurs ailes du pouvoir». Pour les médias du Makhzen, tout ce remue-ménage est l’œuvre du frère du Président et du chef d’état-major de l’ANP qui «veulent se débarrasser de toute voix gênante et concurrente dans les rangs de l’armée».
Il va de soi que, hormis les analyses calquées sur les médias algériens, les lectures de nos confrères marocains participent des supputations fantasmagoriques dues à un manque d’information criant, mais aussi à une volonté manifeste de déformer les faits en prédisant insidieusement une période de troubles dans les mois à venir. Les analyses en question pêchent par une ignorance manifeste du fonctionnement de l’armée algérienne et de sa composante. En affirmant que le but visé par les changements serait d’«écarter les généraux concernés par le mandat actuel de Bouteflika», les «observateurs» marocains ne savent pas que leurs remplaçants appartiennent à la même génération, sont issus des mêmes rangs et ne sont ni de près ni de loin liés à la politique.
Les aiguilles de l’horloge marocaine se sont arrêtées au début des années 1990 où l’armée avait dû jouer son rôle constitutionnel pour sauver la République qui était menacée par les extrémistes religieux. Depuis, beaucoup d’eau a coulé sous les ponts.
K. B.
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