Al-Jazeera censure un documentaire sur le lobby sioniste pour plaire à Trump
Par Sadek Sahraoui – Al-Jazeera, qui passe son temps à donner des leçons de journalisme aux médias arabes, a dernièrement fait l’amère expérience de la censure. Son propriétaire, l’émir du Qatar, a interdit en effet, entre fin 2017 et début 2018, la diffusion d’un documentaire consacré par une équipe de journalistes de la chaîne de télévision au poids du lobby sioniste aux Etats-Unis. Intitulé The Lobby – USA, le film revient avec preuves et témoignages à l’appui sur la manière dont les groupes de pression défendent au pays de l’Oncle Sam les intérêts d’Israël et la politique d’apartheid que mène la droite israélienne dans les Territoires palestiniens occupés.
Organisé en quatre épisodes de cinquante minutes, ce documentaire, qui a nécessité beaucoup de moyens et plusieurs mois de travail, est intéressant en ce sens qu’il est parvenu à mettre des noms et des visages sur les personnalités américaines hostiles à la création d’un Etat palestinien qui, tapis dans l’ombre, s’activent à saborder le processus de paix au Proche-Orient et «sioniser» la politique extérieure américaine.
La réalisation de cette enquête, qui promettait des révélations explosives, a été rendue possible grâce à un reporter infiltré dans leurs rangs et filmant en caméra cachée. «Le documentaire promettait de révéler les méthodes clandestines employées par ces organisations, très richement dotées, pour s’attacher le soutien quasi unanime du Congrès et contrer leurs adversaires dans la bataille pour l’opinion publique», rapporte Le Monde dans un article publié cette semaine.
Le quotidien français rapporte que «durant la fin de l’année 2017 et le début de l’année 2018, le sort de ce film, nimbé de secret, a obsédé les cercles militants pro-israéliens et pro-palestiniens aux Etats-Unis, les premiers se méfiant de sa diffusion comme de la peste et les seconds l’attendant comme le messie». L’auteur de l’article du Monde soutient que Cheikh Tamim Ben Hamad Al-Thani, dont le pays tente d’apparaître comme le défenseur de la cause palestinienne, a décidé de mettre le documentaire sous le coude pour ne pas fâcher ses amis américains.
La même source soutient qu’il n’y a pas qu’aux Etats-Unis où le lobby pro-sioniste est actif. Le Monde rappelle à ce propos qu’un documentaire du même genre a été aussi consacré en 2017 aux lobbys pro-israéliens au Royaume-Uni. Mais à l’inverse du Qatar, dont l’émir n’a pas voulu froisser la susceptibilité de Donald Trump et de Benyamin Netanyahou, la télévision qui a commandé l’enquête s’est battue pour le diffuser et Ofcom, le gendarme du paysage audiovisuel britannique, l’a défendu.
Le documentaire en question avait montré un diplomate israélien conspirant avec un haut fonctionnaire pour faire «chuter» un ministre aux positions jugées trop pro-palestiniennes. Pris en flagrant délit d’ingérence dans la vie politique britannique, l’ambassade israélienne avait dû d’ailleurs publier des excuses officielles et renvoyer au pays son très zélé employé. Au même moment, Al-Jazeera s’employait à faire la promotion de l’intégrisme et à déstabiliser les pays arabes progressistes.
S. S.
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