Contribution de Bachir Medjahed – L’ethnicisation : un danger pour l’Algérie
Par Bachir Medjahed – L’ethnicisation des relations intercommunautaires n’est pas une menace stratégique. Elle est un danger réel. La plus grande des vulnérabilités de l’espace de défense n’est pas liée à la faiblesse du nombre de divisions blindées mais à l’existence et à l’importance des divisions ethniques. Quel espace de défense pouvons-nous construire si le sentiment national est mis à mal par la diabolisation des appartenances à différentes communautés ?
Les contextes internationaux et nationaux ont changé. A l’époque des colonisations, le droit des peuples à disposer d’eux-mêmes était à l’honneur. C’était pour réclamer l’indépendance face au colonialisme. Depuis l’accès à l’indépendance, le concept d’autonomie a cédé la place à celui de sécession car, disent ceux qui les revendiquent, l’indépendance a été confisquée. Des ethnies différentes, des cultures différentes, des vécus différents, des langues différentes.
Pour les Algériens, une injustice a été réparée. C’est sûrement la décision historique qui va renforcer le sentiment unitaire, la cohésion nécessaire à la construction de l’espace de défense nationale. N’est-ce pas que nous avons un ministère de la Défense nationale et non un ministère des Armées ? La défense intègre les populations dont la mobilisation s’articule autour des forces armées. Plus aucune langue ne sera dominée par la force. Aucune culture étouffée par la force. Plus de vécu historique renié par la force.
Continuer à vivre ensemble ? Ni intégration au pouvoir par le pouvoir, ni soumission au pouvoir par la résignation, ni assimilation car l’attachement aux racines n’est pas négociable. Nous ne sommes plus là, devant quelques-unes des revendications du droit des peuples à faire sécession.
S’il arrive que des parties de populations ethnicisent leurs rapports à d’autres, la solution n’est pas dans leur diabolisation – ce qui ne règle rien – mais dans l’établissement d’un dialogue. Dialoguer ne signifie pas «justifier», encore moins négocier mais comprendre.
Il faudrait que la paix par le dialogue soit l’objectif en faveur duquel devrait se structurer la pensée stratégique. D’abord, trois lignes rouges à ne pas dépasser pour n’avoir pas à instaurer un processus sans fin de carnages : ce sont l’intégrité territoriale, l’unité nationale et la souveraineté nationale. Ces trois principes fondent l’action de la diplomatie algérienne.
Pourquoi la paix par le dialogue ? La première et la plus durable est celle qui s’obtient par le dialogue. Celui-ci devient le résultat de compromis acceptables et acceptés où les belligérants deviennent des interlocuteurs et finissent par devenir des partenaires. L’épuisement du dialogue débouche sur un solde de tous comptes. Il n’y a plus de dettes de sang au nom de la paix pour les générations futures.
Le deuxième type de paix est le résultat de la guerre interne. Mais il ne s’agit pas de guerre entre deux armées de pays différents. Ce sont des conflits internes qui ouvrent la voie au terrorisme international. La situation devient compliquée par l’intervention de multiples intérêts étrangers. D’autre part, aussi bien les conflits internes armés que l’apparition du terrorisme et son expansion viendraient justement des ingérences militaires extérieures.
B. M.
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