Les Etats-Unis volent au secours de l’Italie y compris sur le plan financier
De Rome, Mourad Rouighi – Deuxième puissance industrielle et troisième économie en Europe, l’Italie, fait face depuis trente ans, néanmoins, à la donne de son endettement qui tel un boulet au pied, freine sa croissance depuis des décennies.
Pour preuve, en 1988 sa dette publique s’élevait à 550 milliards de dollars, tandis qu’elle est aujourd’hui de l’ordre de 2 300 milliards d’euros. Au passage, Rome a payé 3 000 milliards de dollars au chapitre de service de cette dette. De fait, les politiques d’austérité menées par les divers gouvernements ont été peu probantes : les hausses de la fiscalité ont conduit de manière cyclique à des contractions de l’économie et une augmentation du ratio de la dette. Résultat de ces choix : un taux de chômage qui a dépassé les 12 % en 2014.
Or, pour inverser cette tendance, une étape décisive devant mener au virage tant attendu, pourrait être celle amorcée en mai 2018, avec l’arrivée au pouvoir de la coalition réunissant deux partis réfutant ouvertement les solutions des technocrates de Bruxelles : le Mouvement 5 étoiles et la Ligue du Nord.
Certes le problème numéro un pour ce gouvernement et pour l’Italie est toujours le même, à savoir la dette et le service de celle-ci, mais sa gestion n’est pas en discussion. Bien que la véritable clef du salut, selon le cabinet actuel réside dans la croissance économique et les mesures mises en acte, pourront booster l’économie italienne et dégager ces atouts, qui de tout temps, ont fait de ce pays, un des acteurs commerciaux les plus dynamiques, sur le plan international. Une approche partagée par les experts de JP Morgan, le géant mondial qui gère des avoirs pour deux trillions de dollars et qui possède un portefeuille d’obligations de plus de 500 milliards de dollars.
Cette ouverture de crédit de la part du géant newyorkais contraste avec les notes de Fitch et de ses consœurs Standard & Poor’s et Moody’s, qui au début de septembre avaient déclassé la note de la dette souveraine italienne. Mais le gouvernement de Giuseppe Conte semble préférer relativiser cette donne. En effet et après une mission pékinoise couronnée de succès avec les investisseurs chinois et en marge de la réunion du FMI du 11 octobre, tenue à Bali, en Indonésie, le ministre de l’Economie, Giovanni Tria, a rencontré son homologue américain, Steven Mnuchin, lui confirmant l’engagement de l’Italie à réduire le rapport dette/PIB et lui illustrant les contours de la prochaine loi de finances 2019, axée sur le besoin de retrouver dès les prochains mois, le chemin de la croissance.
De son côté, Steven Mnuchin a appelé à un rapide retour de la stabilité des marchés, tout en mettant en garde les opérateurs financiers à ne pas essayer de déstabiliser la zone euro, à travers l’Italie.
Ce proche parmi les proches de Donald Trump signifiait, en l’occasion, aux marchés financiers que Washington est bien intentionnée à soutenir Rome et que bientôt des colosses de la finance américaine, sur indication directe ou indirecte de la Maison-Blanche, feront auprès des investisseurs américains et mondiaux, la promotion des bons du Trésor italien et de ces titres de dette souveraine BTP. Ce soutien, ô combien précieux pour Giuseppe Conte, s’ajoute au blanc-seing accordé à la diplomatie italienne sur le dossier libyen et le rôle qu’elle s’apprête à jouer, dans le cadre du projet dit «de la Méditerranée élargie», si cher au président américain.
Un constat partagé par le quotidien romain La Repubblica, qui relève que le renforcement de l’axe Washington-Rome, y compris dans le domaine financier, n’est que la conclusion logique du «feeling» entre l’Administration Trump et la majorité politique en Italie, qui depuis le sommet de juillet dernier, ont su créer une synergie plurielle portant sur plusieurs dossiers et nombre de thèmes.
Et selon un expert des questions américaines, cela dénote, que si Washington croit en la capacité de Rome de jouer pleinement ces divers rôles et elle est prête à la soutenir, vu d’Italie, ce soutien configure une sorte de droit de préemption par rapport à d’autres puissances européennes, sur des sujets aussi cruciaux que la Libye, les médiations avec Moscou et Téhéran sur la question des sanctions et la gestion du dossier des migrants.
M. R.
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