Les enfants de Hocine Aït Ahmed contestent les sanctions contre des cadres du FFS
Par Hani Abdi – Une semaine après les sanctions infligées aux députés Salima Ghezali et Chaffaâ Bouaïche, la famille du défunt Hocine Aït Ahmed déclare clairement contester les décisions et, globalement, la gestion de la direction actuelle du parti, issue du congrès extraordinaire de l’instance présidentielle d’avril dernier.
Dans cette déclaration, les enfants de feu Aït Ahmed précisent avoir eu l’accord de leur mère et veuve du fondateur du parti. Les enfants d’Aït Ahmed s’adressent aux membres du conseil national du parti, réunis aujourd’hui. La famille Aït Ahmed veut visiblement influencer cette instance délibérante et de contrôle, en demandant à ses membres de faire preuve, à titre individuel, de «sens de responsabilité et d’honneur» en rectifiant la «trajectoire» du parti.
Les enfants de Hocine Aït Ahmed, à leur tête Jugurtha qui a eu déjà à se solidariser avec, particulièrement, Salima Ghezali, radiée du parti, appellent, en des termes clairs, à ne pas entériner la décision de radiation de cette députée et ex-conseillère de leur défunt père. Ils qualifient la réunion de la commission de médiation, le 6 octobre dernier, d’un épisode «ubuesque et kaflaïen», «illustré par le refus du président de cette commission d’en signer le procès-verbal avec remise de sa démission séance tenante».
Les enfants d’Aït Ahmed poursuivent en affirmant que valider une telle décision n’est que «légitimer irréversiblement au sein du FFS les pratiques superficielles aux relents staliniens». Les enfants d’Aït Ahmed interpellent aussi les militants du parti en leur qualité de «dépositaires et porteurs des valeurs, à titre collectif, des principes et des fondamentaux du FFS», en leur rappelant qu’«il leur revient légitimement, en particulier en cette grave crise que vit le parti, de susciter et d’organiser pacifiquement, et sans violence, des débats à cet égard dans chacune de vos structures ainsi que de réinstaurer formellement les pratiques de collégialité, de débat libre et de concertation pour un consensus». Les enfants d’Aït Ahmed s’adressent également à chacun des trois instances dirigeantes du parti (conseil national, instance présidentielle et secrétariat national) afin qu’ils assument ouvertement leurs positions et leurs responsabilités sans se cacher derrière le portrait de Hocine Aït Ahmed.
Les enfants d’Aït Ahmed concluent leur déclaration en exprimant leur soutien à Salima Ghezali et à tous ceux qui ont été sanctionnés ces derniers mois au sein du parti tels que Abderrezak Zemmouri et Soraya Louz. Par leur sortie, les enfants d’Aït Ahmed jouent sur la «légitimité» de leur père en voulant se poser comme les «gardes du temple FFS».
La sortie des enfants d’Aït Ahmed aggrave les «fissures» au FFS
En voulant défendre Salima Ghezali, radiée par la commission de médiation et de règlement des conflits, les enfants d’Ait Ahmed aggravent les fissures au sein du FFS. Les partisans de la politique actuelle du parti et les mécontents se livrent une guerre féroce sur les réseaux sociaux. Les commentaires suscités par cette sortie, inhabituelle de la famille Aït Ahmed, en disent long sur la profonde crise que vit aujourd’hui le plus vieux parti de l’opposition. Les partisans de la politique actuelle du parti, menée par la nouvelle instance présidentielle issue du congrès extraordinaire tenu en avril dernier, et les défenseurs de l’ancienne équipe, mise à l’écart, s’affrontent à fleurets mouchetés. «Après cette déclaration qui exprime on ne peu mieux les attentes de la base, les membres du conseil national ont l’obligation d’assumer leurs responsabilités et de rendre un peu d’espoir aux militants en déclarant persona non grata tous ces aventuriers», affirme un militant qui apprécie visiblement la déclaration des enfants d’Aït Ahmed.
L’ex-secrétaire national chargé de la communication, Hassan Ferli, dit «partager avec honneur et fierté le message envoyé par la famille de Hocine Aït Ahmed». Pour lui, «l’idéal et les valeurs pour lesquels Hocine Aït Ahmed a consacré toute sa vie, et sa famille en connaît plus que les autres sur cela, doivent continuer à vivre au FFS».
Un autre militant estime que «le FFS a été l’un des broyeurs de la démocratie en Algérie». Pour Samir Bouakouir, ancien premier secrétaire du parti, le FFS a besoin d’un congrès de refondation. Pour lui, «la radiation de Salima Ghezali du FFS pour n’avoir pas demandé l’autorisation de publier une opinion politique est à la fois choquante et absurde. Si le règlement intérieur et les statuts sont opposables à tout un chacun, les invoquer pour bâillonner la libre expression est absolument condamnable». «Les purges staliniennes, dont j’ai été victime tout comme nombre de cadres et de militants ainsi que les règlements de comptes doivent cesser pour laisser place à une rencontre nationale où seront conviés anciens et nouveaux cadres, non pas dans une sorte de messe faussement fraternelle, donnant lieu à des congratulations hypocrites, mais pour engager une sérieuse réflexion politique et stratégique sur l’avenir du pays, comme un prélude à l’organisation d’un congrès de refondation», soutient-il.
D’autres dénoncent cette «intrusion» des enfants d’Aït Ahmed qui ne sont ni militants ni cadres au sein de cette formation. «Il n’y a pas de système héréditaire au FFS. Le parti appartient à ses militants et ses décisions émanent de ses directions portées par la base», clame un militant qui approuve les décisions de la direction actuelle et espère que «le parti sera réellement, comme l’a promis Ali Laskri, rendu à ses militants». «Il est temps de remettre le flambeau aux nouvelles générations et en finir avec la légitimité historique, de se cacher dernière les symboles de la révolution et des figures politiques qui ont fait leurs temps», tonne un autre militant. Pour d’autres, la seule légitimité possible est celle de l’action sur le terrain.
Globalement, les commentateurs admettent que le FFS est en crise et qu’il lui faudra un électrochoc pour le remettre sur rail, à travers un congrès de réunification. Car, aujourd’hui, le plus vieux parti de l’opposition est bien divisé, entre ceux qui applaudissent la tentative d’immixtion de la famille du défunt Aït Ahmed dans les affaires du parti et ceux qui la désapprouvent totalement.
H. A.
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