Opposition à de nouvelles mosquées en Europe : l’exception italienne
De Rome, Mourad Rouighi – A une époque où, un peu partout en Europe, l’islamophobie se banalise et où les médias deviennent le règne du pyromane qui fait aisément bon ménage avec le pompier, la question de la construction des mosquées crée chez les musulmans du Vieux Continent une sensation de preuve probante de leur mise à l’index et devient, ainsi, par la force des choses, un enjeu politique disputé par les partis islamophobes qui, en relançant inlassablement les clichés les plus négatifs, sont bien intentionnés à surfer sur la vague de suspicion et de haine qui prévaut à l’égard des disciples de la dernière religion monothéiste révélée.
Exemple édifiant parmi tant d’autres, les polémiques qui font rage dès lors qu’un projet de mosquée voit le jour. Des polémiques qui montrent bien, encore une fois, que la liberté de culte rencontre des obstacles en Europe dès qu’il s’agit de l’islam. Et, dernier chapitre de ce long feuilleton, le projet d’une mosquée à Bergame, en Lombardie, qui suscite une vague de polémique et dont s’est saisie la classe politique pour diverses raisons.
Or, pour certains observateurs avisés, l’Italie a toujours fait quelque peu exception, puisque ne se laissant pas impressionner par l’imposant battage médiatique ambiant et ayant affiché depuis des années son intention d’aboutir rapidement, à travers un accord organique avec les représentants des communautés musulmanes du pays et notamment la Grande Mosquée de Rome, à un statut clair, à l’instar de ceux des autres groupes religieux, à même de banaliser le sujet et de le gérer au chapitre du droit à l’exercice de la foi, en étroite collaboration avec les autorités italiennes et des représentants des 57 Etats musulmans.
Sur le versant politique, cette approche pragmatique et constructive fait l’objet de critiques de la part d’une certaine intelligentsia que d’aucuns qualifient d’«usine du prêt-à-penser» et qui participe volontairement ou involontairement au climat de suspicion qui règne en ce moment en Europe à l’égard des fidèles de cette religion.
Et la communauté musulmane dans tout cela ?
Les nombreux fidèles interpellés à la sortie de la prière du soir, conscients du contexte actuel, préfèrent adopter un profil assez discret et tiennent avant tout à se rassurer: «La décision entérinée par les divers gouvernements servira à calmer les esprits et à arriver à l’objectif de manière transparente, parce que nous n’avons rien à cacher et notre unique but est de pouvoir exercer notre culte conformément aux lois de la République et en harmonie avec les autres communautés religieuses qui, d’ailleurs, nous soutiennent dans notre démarche», souligne Idir Ouchickh, président de l’Association islamique de Bergame, destinataire à terme de ce lieu de culte.
Des propos qui servent à mettre un bémol à l’hystérie qui saisit de temps à autre certains médias mais qui dénote tout de même que les musulmans en Europe ont bien compris que les temps se sont faits de plus en plus durs et qu’il leur faudra à l’avenir s’armer de patience et de sagesse pour arriver au bout de leurs peines et arracher le droit de pratiquer leur religion, loin des amalgames et des préjugés, tout en respectant les lois des divers pays d’accueil.
M. R.
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