Un événement dans la vie de Hocine Aït Ahmed : l’évasion de la prison d’El-Harrach
Par Mohamed Rebah(*) – La vie de Hocine Aït Ahmed fut marquée par un évènement majeur : son évasion le 1er mai 1966 de la prison d’El-Harrach, dans la banlieue est d’Alger, où il était détenu depuis le mois d’octobre 1964.
Hocine Aït Ahmed, ancien membre du «Comité des 9» qui déclencha l’insurrection du 1er Novembre 1954, s’est trouvé au lendemain de l’indépendance, en septembre 1962, en désaccord avec Ahmed Ben Bella sur la question du pluralisme politique. Celui-ci, devenu président du Conseil, voulait transformer le FLN, dont il était membre du Bureau politique, en parti unique. Aït Ahmed était pour le multipartisme. Il a même protesté contre l’interdiction du Parti communiste algérien (PCA) intervenue au mois de novembre 1962.
L’idée d’Ahmed Ben Bella s’étant imposée avec l’aide de Houari Boumediene, chef de l’ANP, Hocine Aït Ahmed créa alors un parti d’opposition, le Front des forces socialistes (FFS). Entouré d’anciens officiers des Wilayas III et IV, il créa un maquis en Kabylie pour s’opposer par les armes au pouvoir.
Arrêté au mois d’octobre 1964, il fut condamné à mort puis gracié par Ahmed Ben Bella, président de la République. Il devait être élargi suite à un accord FLN-FFS. Mais…
Un autre évènement intervint dans la vie du pays : le 19 juin 1965, le colonel Houari Boumediene renversa Ahmed Ben Bella. L’accord FLN-FFS devint caduc et Hocine Aït Ahmed resta en prison. C’est là qu’intervient son ancien camarade de parti (PPA-MTLD) des années 1940 : Lakhdar Rebbah.
Lakhdar Rebbah, connu pour avoir été en 1955 le premier assistant d’Abane Ramdane à Alger, jura à Hocine Aït Ahmed de tout faire pour le sortir de prison. Il discuta de son projet avec Mohamed Merzougui, qui avait été membre avec lui de la Fédération du Grand Alger du FLN, puis passa à l’acte. Il contacta un gardien de la prison d’El-Harrach, Chouli, son ancien codétenu de la prison de Loos, au nord de la France.
La date du 1er mai 1966 fut retenue. Chouli fit sortir Hocine Aït Ahmed, vêtu d’un voile, au milieu des nombreuses femmes de sa famille venues lui rendre visite. Face à la lourde porte de la prison, une voiture R4 attendait. Le désormais évadé fut conduit, dans un premier temps, au quartier du lycée Abane-Ramdane où l’attendait Lakhdar Rebbah. Celui-ci le prit en charge et l’emmena dans sa villa à Alger-Plage où son départ vers le Maroc fut mis au point.
Accompagné par Chouli, le «fugitif» prit le chemin de l’ouest dans un camion de transport de meubles appartenant à la famille Rebbah.
La frontière avec le Maroc fut traversée sans encombre. Libre, Hocine Aït Ahmed retrouva son beau-frère Mohamed Khider, en exil depuis quelque temps. Ils rejoignirent ensemble la Suisse.
Lakhdar Rebbah, dit El-Ghazal, le militant utile et efficace, avait tenu parole.
M. R.
(*) Chercheur en histoire, auteur
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