Pourquoi le monde arabe est en danger
Par Bachir Medjahed – Excédé par le nombre de victimes civiles de bombardements des populations civiles yéménites par l’armée saoudienne, le président Trump fait un aveu de taille. L’armée saoudienne est formée d’incompétents à utiliser les armes américaines. Mais, alors, pourquoi lui fournir des armes en trop grande quantité et de qualité ? Au moins deux explications possibles. La première entre dans le concept non périmé de guerre coopérative qui fait des Saoudiens des supplétifs et des sous-traitants. La seconde est qu’il s’agit pour les armes de qualité de servir de matériel pré-positionné qui attendra l’armée américaine quand s’exprimera le besoin que celle-ci intervienne.
Toute une explication de taille également soit des dizaines de milliards de dollars en jeu. Finalement, les Saoudiens paient aux Américains les armes que ces derniers auront à utiliser en cas de besoin. Pas de leurre. Les cibles autant saoudiennes qu’américaines seront toujours les pays arabes (et assimilés) et les pays musulmans non arabes.
Qu’un pays soit musulman, islamiste, laïc avec l’islam comme religion dominante ou musulman situé en Asie, il aura trois adversaires de taille : le wahhabisme qui lui donne le baiser mortel et tous les terrorismes qui se créent dans son sillage, sa politique interne qui brise son unité et sa soumission à des intérêts étrangers.
Les pays arabes s’étaient juré fidélité mais sont prêts à se trahir. La Charte de la Ligue arabe promet la solidarité face à un adversaire ou un agresseur d’un pays arabe par tous les moyens, y compris militaires. Mais pour certains d’entre eux, c’est plutôt le voisin qu’il faudrait craindre. Le voisin peut être l’ennemi. Quel pays arabe n’a pas son ennemi stratégique ? C’est même l’existence de l’ennemi stratégique qui permet à chacun de justifier l’achat d’armes et d’entamer une course vers l’armement. Ceux qui disposent de moyens financiers se le permettent, d’autres se le font acheter. Il n’est plus possible de continuer à croire encore que les régimes arabes vont unir leurs pays. Il ne faudrait plus que les peuples s’illusionnent une fois de plus. Une fois de trop. Les déceptions sont frustrantes. Tous les projets entamés dans ce sens ont échoué.
Aucun espoir pour la construction du monde arabe, y compris du Grand Maghreb. Un accord de défense entre un pays arabe et une grande puissance est supérieur à n’importe quel accord inter-arabe. C’est la justification présentée par le Qatar pour expliquer que son territoire est mis à disposition des Etats-Unis pour agresser l’Irak, malgré le refus onusien d’accorder la caution internationale.
Les pays arabes sont encore plus en danger qu’avant. Chaque pays arabe paie le projet américain du Grand Moyen-Orient. Les facteurs à invoquer comme alibis pour justifier l’agression par une coalition occidentale existent partout. Quel pays arabe n’a pas ses minorités ? Quel pays arabe n’a pas des ressources minières ou du pétrole à convoiter ? Même des pays à système politique laïc sont condamnés à retourner à l’âge de pierre. Peu importe que le régime laïc soit remplacé par un régime islamiste. Les régimes arabes doivent d’abord se regarder dans les yeux. Quelles sont leurs vulnérabilités ? Pourquoi n’y a-t-il pas eu une cohésion nationale irakienne pour former un front uni contre l’invasion terrestre américaine ? Pourquoi l’Irak a-t-il neutralisé ses propres divisions blindées par ses divisions ethniques ? Pourquoi les pays arabes se trouvent-ils devant une déstabilisation et une insécurité durables ? L’Irak est plus près de la partition que de l’unité du peuple et du territoire. L’Irak n’est pas devenu démocrate. Il a perdu tout espoir de retrouver un jour une certaine stabilité, même relative. Ce n’est plus un Etat mais une surface géographique. Il n’est point utile de citer les exemples de la Libye et de la Syrie.
B. M.
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