Le «blâme» de Yousfi ou les retombées de l’affaire Khashoggi sur l’Algérie
Par Kamel M. – Sur un ton protocolaire et courtois, certes, l’Algérie a fait savoir aux Saoudiens, par la voix de son ministre de l’Industrie, Youcef Yousfi, que les investissements saoudiens en Algérie sont loin d’être satisfaisants. Ce à quoi les officiels saoudiens répondent que cela est vrai et qu’ils reverront leur copie maintenant qu’ils ont entendu les doléances des responsables politiques algériens.
C’est un prince héritier, dont la prise du pouvoir est sérieusement menacée, qui a atterri ce dimanche soir à Alger où il a été accueilli par le chef de l’Exécutif. Le protocole ayant ses règles et ses circonstances, Mohammed Ben Salmane, qui se rend en Algérie en tant que prince héritier et représentant de son père, le roi Salmane, dans le cadre d’une visite officielle, aurait dû être reçu par le deuxième homme de l’Etat, Abdelkader Ben Salah, qui se trouve à Mexico où il représente Bouteflika à l’investiture du nouveau président mexicain. Mais cet accueil par le Premier ministre a aussi une signification politique.
En effet, gênés par le rejet d’une bonne partie des Algériens de la venue de Mohammed Ben Salmane en Algérie suite à l’affaire Khashoggi et en raison des massacres commis par l’armée saoudienne au Yémen, les responsables politiques ont fait en sorte que la visite ne déborde pas du cadre économique, du moins officiellement, bien qu’il soit peu probable que les interlocuteurs algériens de Ben Salmane aient abordé le scandale de l’assassinat du journaliste opposant saoudien en Turquie par des hommes de main du régime wahhabite.
Mohammed Ben Salmane est venu se refaire une virginité, comme annoncé par Algeriepatriotique dans un précédent article. Et pour ce faire, Riyad devra montrer des signes de bonne foi sans que cela s’apparente à un achat du silence de l’Algérie dans cette affaire qui a bouleversé la communauté internationale. L’Algérie avait tardé à réagir par souci de non-ingérence dans une «affaire interne» à l’Arabie Saoudite, en affirmant qu’elle faisait pleinement confiance en la justice saoudienne qui saura faire la lumière sur les circonstances de la mort de Jamal Khashoggi au consulat d’Arabie Saoudite à Istanbul.
L’Algérie a évité le piège du conflit entre l’Arabie Saoudite et le Qatar qui a amplifié l’événement, à travers ses médias, et avec le concours de son allié turc pour affaiblir son frère-ennemi saoudien. Se retenant de commenter l’affaire Khashoggi, elle vient néanmoins de faire savoir implicitement à son hôte que l’Arabie Saoudite devra faire en Algérie le même effort qu’au Maroc où l’investissement direct saoudien a connu une hausse considérable ces dernières années.
K. M.
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