A l’approche d’avril 2019 : ébullition sociale contre statu quo politique
Par R. Mahmoudi – Alors que la classe politique s’englue dans des débats aussi stériles que labyrinthiques sur les prochaines échéances électorales, le front social s’agite à nouveau, avec la reprise des mouvements de grève dans plusieurs secteurs d’activité et la montée fulgurante des contestations de rue, à l’image de la grande manifestation organisée, mardi dernier à Béjaïa, par les comités de soutien à Issad Rebrab, qui prélude d’autres actions de même envergure dans les prochaines semaines.
Mais, comme dans tous les grands mouvements sociaux en Algérie, l’étincelle vient toujours du complexe sidérurgique d’El-Hadjar, berceau des luttes syndicales et véritable indicateur de la stabilité sociale dans le pays. Dimanche dernier, des ouvriers contractuels ont déclenché un mouvement de grève pour exiger leur nomination, après l’échec du dialogue avec la direction générale. Leur mouvement a réussi, depuis mercredi, à paralyser entièrement la chaîne de production.
Cet accès de tension dans le plus grand complexe industriel du pays coïncide avec un bouillonnement sans précédent à la Maison du peuple, siège de la centrale syndicale à Alger, où des opposants à l’actuel secrétaire général de l’UGTA, Abdelmadjid Sidi-Saïd, ont organisé un nouveau rassemblement de protestation, réclamant le départ «immédiat» de toute la direction qu’ils accusent, entre autres, de «travailler contre les intérêts des travailleurs», de «violer les statuts de l’organisation» et de la «mener à la dérive».
Il est clair que cette soudaine «éruption» des opposants à Sidi-Saïd cache des motivations d’appareils ou de luttes politiques, mais c’est bien un signe que la centrale syndicale a perdu de sa cohésion et ne joue plus son rôle de stabilisateur comme avant. Aussi, la multiplication des syndicats autonomes dans nombre de secteurs, et notamment dans l’éducation et l’administration publique, a-t-elle fini par réduire considérablement l’influence de l’UGTA.
Signe des temps : même la coordination des imams se met de la partie, en se mobilisant pour réclamer ses droits et en poussant l’outrecuidance jusqu’à narguer le ministre de tutelle et de menacer de sortir dans la rue. Devant l’impasse, les imams ont décidé, jeudi, de passer à l’action, en appelant à un sit-in, sans afficher la date ni le lieu, pour éviter qu’il soit empêché.
Sur ces entrefaites, les partis politiques, opposition et alliance, gesticulent et se complaisent dans les querelles de salons, sans aucun pouvoir de mobilisation réelle.
R. M.
Comment (9)