Quelle continuité ?
Par Akram Chorfi – Quelles motivations pour les uns et les autres, au sein du landernau politique, qui pousse à soutenir ce que l’on pourrait percevoir comme impensable : un report de l’élection présidentielle ?
Quelle forme de crise pourrait-on mettre en avant pour justifier un consensus autour d’une décision qui ne peut être invoquée, nous disent les constitutionnalistes, qu’en cas de guerre ou de catastrophe majeure qui aurait un caractère aussi impérieux qu’un conflit armé ?
La classe politique au pouvoir, tous partis confondus, semble avoir convenu, comme d’un commun accord, de ne plus parler de 5e mandat, l’idée, désormais, étant de mettre en avant, semble-t-il de plus en plus, la notion de continuité. Ce qui, au sens où cela s’entend, correspond à peu près à la même chose, sauf que dans cette logique nouvelle, la personne du président Bouteflika n’est plus mise en avant comme le fer de lance de cette continuité, cela même si, par un effet d’induction, la continuité dont il est question a pour référent politique la période de gouvernance présente et toutes les autres qui l’ont précédée dont l’artisan n’est autre que le Président.
Ce qui, à l’évidence, met en avant plus un changement dans la manière de communiquer que dans la vision que les auteurs de ce changement ont des lendemains de la présidentielle. Ce changement semble avoir son importance, tant il est vrai qu’il est plus réaliste de dire : «Je revendique la continuité comme une nécessité, car cette continuité est la condition de ma confiance dans l’avenir de l’Algérie», que de dire : «Je veux un 5e mandat pour le président Bouteflika.»
Cette option, par son caractère synthétique et équivoque, permet à la fois de soutenir la continuité et de se donner de la marge pour soutenir un 5e mandat au cas où le concerné, autrement dit le Président lui-même, décide de se lancer dans l’aventure électorale pour une autre mandature. Ce qui permettra, en termes de communication, de dire, après coup : «Je revendique la continuité comme une nécessité, je revendique un 5e mandat pour le président Bouteflika».
Ce procédé permet d’éviter d’exposer le Président aux attaques de l’intérieur et de l’extérieur, comme on a pu le constater au lendemain de l’annonce partisane, faite par l’inénarrable Ould-Abbès, alors SG du FLN – mal interprétée par les médias étrangers – qui disait le président Bouteflika candidat du vieux parti unique et qui avait suscité un incroyable et inexplicable remue-ménage médiatique en Occident.
Si, par ailleurs, nous soutenons l’idée de continuité avec ou sans le président Bouteflika, nous serions amenés à spéculer sur le profil d’homme politique susceptible d’être le tenant lieu du président sortant, tout en étant en mesure d’être à la hauteur – et le dépositaire – de cette continuité qui est garante d’une continuation sereine du processus d’édification nationale, loin des tentations de rupture qui semblent inquiéter, de façon consensuelle, la classe politique, y compris dans la mouvance islamiste.
A. C.
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