Que cache la polémique sur les programmes religieux à l’école ?
Par R. Mahmoudi – Les propos tenus il y a quelques jours par le ministre des Affaires religieuses, Mohamed Aïssa, considérant que le programme des sciences islamiques dans les lycées «engendrait des takfiristes», ne finit pas de faire des vagues.
Si le ministère de l’Education nationale y a vaguement réagi, en affirmant que les programmes sont préparés d’un commun accord avec le ministère des Affaires religieuses, le climat est loin d’être assaini. Ce sont, curieusement, les hommes de religion que les adeptes du programme religieux à l’école qui semblent plus tenaces et plus convaincus. C’est le cas de l’imam de Djamaa El-Kebir d’Alger et ancien militant du FIS dissous cheikh Ali Ayya, qui trouve incongrus et erronés les propos tenus par un membre du gouvernement, en l’occurrence Mohamed Aïssa.
Invité mercredi d’une émission de débat sur Ennahar TV, cheikh Ali Ayya affirme avoir ausculté tous les manuels de sciences islamiques, de la 1re année secondaire à la terminale, il n’y a rien trouvé de «suspect». Il propose même de soumettre les programmes en question à une «commission spécialisée» pour bien vérifier s’ils sont oui ou non entachés d’anomalies. En défenseur du système éducatif, il affirme qu’aucun des hadiths ou versets coraniques enseignés aux lycéens ne cultive cet esprit «takfiriste» évoqué par Mohamed Aïssa. «Au contraire, insiste-t-il, ces textes portent exclusivement sur la foi et la bonne conduite.»
Le ministre des Affaires religieuses est mis au défi d’argumenter son constat par des exemples clairs ou d’ordonner une enquête sur des faits aussi graves, à défaut de quoi ses accusations peuvent entretenir de dangereux amalgames sur l’implication de l’Etat dans la propagation d’une doctrine qui est reconnue comme étant le creuset idéologique de l’intégrisme et de son corolaire, le terrorisme.
Acculé sur son propre terrain par une poussée salafiste inédite dans les mosquées, le ministre des Affaires religieuses avait accusé le programme des sciences islamiques dans les lycées d’«engendrer des takfiristes et des extrémistes sans qu’ils soient, dit-il, pratiquants». Il a appelé, à la même occasion, à «accélérer la révision» du contenu du programme des sciences islamiques dans le cycle secondaire.
C’est bien la première fois qu’un membre du gouvernement algérien en exercice accuse le système éducatif de son pays de produire des extrémistes. Cette déclaration est venue aussi en signe de solidarité avec la ministre de l’Education nationale, qui est, depuis plus d’une semaine, la cible d’une campagne acharnée dans les médias et sur les réseaux sociaux au sujet de la prière à l’école.
R. M.
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