Le phénomène Nekkaz ou quand un simple smartphone remplace un parti
Par Karim B. – Un seul homme a mobilisé les forces de sécurité à Alger, ce samedi. De longues processions de fourgons des unités d’intervention de la DGSN étaient visibles en différents lieux de la capitale. Les services de sécurité ont voulu parer à tout débordement au moment où l’influenceur sur les réseaux sociaux Rachid Nekkaz se faisait porter par une foule nombreuse qui scandait son nom.
Rachid Nekkaz est sorti de nulle part voici quelques années, lorsque, muni d’un simple téléphone portable, il arpentait les rues parisiennes à la recherche de notoriété, se filmant en train d’enquiquiner l’administration française contre laquelle il a déclaré la guerre au lendemain d’une décision politique interdisant le port du voile intégral dans les espaces publics. L’homme d’affaires s’est alors mis à payer de sa poche les contraventions d’intégristes réfractaires à cette loi française.
Ses apparitions de plus en plus nombreuses et son discours radical lui ont fait gagner des sympathisants en Algérie au point qu’il a décidé de changer de stratégie. Rachid Nekkaz a décidé de se mettre alors à traquer, armé de son seul smartphone, les biens immobiliers de dignitaires du régime algérien en France et ailleurs en Europe. Une action de rue à travers laquelle il multipliera le nombre de ses admirateurs dans ce qui semblait être un «appât» dans la perspective de son entrée en scène en Algérie même.
L’épisode violent de Neuilly, quartier cossu de la banlieue parisienne, où l’ancien secrétaire général du FLN Amar Saïdani a acquis des biens immobiliers, lui a valu d’être considéré par une partie de l’opinion publique algérienne comme un militant «sérieusement engagé» contre la corruption de tout un système. Bien qu’assommé par un coup de poing asséné par un neveu de Saïdani en furie, Rachid Nekkaz s’était quand même filmé le visage ensanglanté, se servant ainsi de cette scène pour augmenter sa cote de popularité auprès des Algériens.
Voyant qu’il a gagné des points de réputation grâce à ses actions dans lesquelles se mêlent le sensationnel et la manipulation – sa supposée expulsion d’Algérie, son annonce farfelue sur la mort du président Bouteflika, le soi-disant refus de se voir refaire son passeport, etc. –, il a fini par se convaincre qu’il était temps pour lui de briguer le poste de président de la République.
Sans programme politique réel et sans soutiens partisans, Rachid Nekkaz joue la carte populiste pour «gêner» le pouvoir en place. Il draine des foules nombreuses à ses «meetings» improvisés à même la rue, mais ces foules lui rendent la pareille en se contentant de le filmer avant de s’éparpiller, heureuse d’avoir assisté à un show burlesque sans envergure politique aucune.
K. B.
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