Qui nous dirige ?
Par Abd El-Karim Boulahouas – Le mot safîh en arabe (pluriel soufahâ’), suivant le contexte où il est utilisé, signifie sot, faible d’esprit, celui qui dépense à tort et à travers, celui qui ne sait pas faire bon usage de l’argent, celui qui ne vaut pas grand-chose sur le plan moral, un homme sans principe, qui manque de discernement, insoucieux, ignorant, frivole et pervers.
Dieu nous interdit de confier nos biens à ce genre de personnes. [Et ne confiez pas aux incapables (soufahâ’) vos biens dont Allah a fait votre subsistance. Mais prélevez-en, pour eux, nourriture et vêtement et parlez-leur convenablement] (Coran : Les Femmes : 5). Les commentateurs du Coran vont jusqu’à interdire à ces personnes d’user de leurs biens personnels, mais de confier la gestion à une tierce personne. Car leurs biens sont aussi les nôtres. La notion de propriété en islam est que tout appartient à Dieu. L’Homme, en tant que vicaire de Dieu sur terre, est chargé de gérer cette propriété dans la voie de Dieu, pour son bien et celui de la communauté en général.
Cet interdit s’appliquerait parfaitement à nos dirigeants qui ont pour mission de gérer les biens et de satisfaire les besoins des peuples que sont l’éducation, la santé, la sécurité, le logement et le travail. Mon pays, par exemple, pour soigner son image à l’étranger, a organisé ces dernières années, plusieurs manifestations culturelles internationales qui ont coûté un énorme budget à l’Etat. Cet argent aurait pu être utilisé pour développer la culture au niveau local, encourager les talents qui se meurent, aider les artistes qui finissent leur vie dans la misère, nettoyer et embellir nos villes et villages qui deviennent hideux, construire des logements, créer des emplois, reboiser le pays d’est en ouest pour stopper l’avancée du désert.
Les exemples de dilapidation des biens de la base au sommet de l’Etat sont nombreux. Et si on ajoutait à cela les vols et détournements, c’est une vraie catastrophe. Un tel système doit être changé. La moindre des solutions pour tout citoyen c’est le boycott par les urnes, le vote blanc dans tous les scrutins et à tous les niveaux, pour ne pas transgresser l’interdit de Dieu. Car, en donnant notre voix à de pareils dirigeants, nous leurs confions la gestion des biens de l’Etat qui sont nos biens à tous. Nous avons donc une part de responsabilité dans la dilapidation de ces biens et la mauvaise gestion du pays. Et la pire des solutions serait une solution à la syrienne où toutes les parties qui s’opposent ont tort, du fait qu’elles s’autodétruisent et détruisent leur pays au grand profit des sionistes et impérialistes.
Si on ne possède pas la force pour imposer le changement et la justice, mieux vaut ne pas aller à l’aventure dont les conséquences sont imprévisibles, et faire appel en fin de compte aux protecteurs de l’Etat sioniste pour nous débarrasser de nos dirigeants. «Le feu du désordre est latent qu’Allah maudisse celui qui le réveille» (hadith). Pour cela, nous devons nous opposer aux aventuriers qui veulent allumer le feu du désordre dans nos pays. Et «le plus grand Jihad, c’est une parole de vérité à la face d’un despote» (hadith). On peut assimiler cela à toute forme d’opposition et de lutte non violente, sur tous les fronts. Et comme il est dit dans un autre hadith, celui qui ne peut éliminer le mal avec sa main, qu’il le fasse avec la parole, sinon avec le cœur et c’est la moindre croyance. L’essentiel est de ne pas se complaire dans la soumission.
L’exemple de l’Irak nous aurait suffi. Doit-on détruire nos pays pour changer de régime ? Dans ce cas, Il aurait été préférable de vivre sous Saddam que de vivre dans l’Irak actuel. «Et mieux vaut être emprisonné par mon frère et garder son bétail que de garder les cochons du roi d’Espagne». Les Etats-Unis ont apporté le chaos et non la démocratie en Irak. Malheureusement, les dirigeants soufahâ’ existent partout dans le monde, même dans les pays avancés où ils ont livré le sort de leur pays et de leur peuple aux créanciers et aux capitalistes, tout en voulant priver les patriotes de parole. «Il viendrait des saisons trompeuses pour les Hommes où l’Homme de peu de valeur prendra la parole pour discuter des questions d’intérêt général» (hadith).
A. B.
NB. : article rédigé en 2013
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