Mon antisionisme
Par Jacob Cohen – C’est la question qui secoue le landerneau politique en France pour éviter de se poser la vraie question sur Israël ou l’Etat juif comme il aime à se définir de plus en plus de manière restrictive.
On a beaucoup glosé sur l’assimilation entre antisionisme et antisémitisme. On reconnaît là le génie maléfique de l’entreprise sioniste qui avait déjà réussi quelques renversements historiques spectaculaires. Faire passer la Palestine pour une «terre sans peuple». Mener des guerres de conquêtes en se faisant passer pour une victime potentielle. Elargir son espace vital pour assurer sa sécurité. Détenir des centaines d’ogives nucléaires et accuser tout adversaire potentiel de vouloir commettre un nouvel holocauste.
Et voilà que les prestidigitateurs sionistes sortent de leur chapeau l’équation magique, inédite, ahurissante, fantasmagorique, de l’antisionisme = antisémitisme. Sans la terreur idéologique qu’exercent les lobbies juifs en Europe – le moindre éternuement du CRIF fait trembler les fondements de la République et lorsque Netanyahou fronce les sourcils l’Allemagne rampe et se couche – et le quasi-contrôle des institutions politiques américaines, cette équation aurait tout au plus suscité un rejet poli voire quelques sarcasmes sur cette prétention qui insulte l’intelligence.
Faut-il rappeler les nombreuses oppositions juives contre l’entreprise sioniste et l’indifférence qu’elle a suscitée parmi les communautés de la diaspora bien installées ? Sans compter les oppositions rabbiniques constantes. Au Maroc, les rabbins nous mettaient en garde contre ces renégats (les agents sionistes envoyés sur place pour susciter des vocations) qui se prétendaient juifs. Israël a arnaqué les juifs des pays arabes, les prétendus juifs éthiopiens, les faux juifs soviétiques, pour la chair à canon, le lumpenprolétariat et le remplissage des villes de développement.
Admettons qu’on oublie le crime originel du sionisme et qu’on admette que le peuple juif aurait droit à une parcelle pour s’y réfugier et trouver la paix. Mais on est loin du compte. Le sionisme révèle de jour en jour sa vraie nature : un projet expansionniste, militariste, raciste, messianique. C’est une Sparte qui doit vivre sur le pied de guerre. Les tensions internes sont telles que sans un ennemi extérieur il y aurait des guerres civiles. Une situation de paix comme on la connaît en Europe amènerait à une coexistence entre juifs et arabes israéliens, véritable cauchemar des identitaires sionistes. Sait-on qu’Israël est le seul pays au monde à avoir deux systèmes d’éducation, de la crèche jusqu’au bac, totalement séparés et hermétiques, juif et arabe ? Dès leur création, les kibboutzim, fleurons de l’athéisme et du communisme, n’acceptaient pas les membres arabes.
Une question que nos analystes, les nouveaux dhimmis du Lobby qui n’existe pas, refusent d’affronter : pourquoi Israël refuse une conférence internationale, où il n’aurait que des alliés ou des amis bienveillants, et qui prendrait en compte ses exigences territoriales et ses conditions de paix ? Et on trouverait une solution juste pour tous les peuples de la région. Parce que le sionisme, de par sa nature et tel qu’il a évolué, est fondamentalement un facteur de guerre. Il n’a pas fini d’élargir son «espace vital» au-delà du Jourdain. Avec l’équation qu’on veut nous vendre, de telles affirmations seraient considérées comme «antisémites».
Que diraient les historiens dans cinquante ans ? Comment de grands pays européens qui imposent des sanctions contre la Russie tremblent devant ce petit Etat voyou qui les nargue et les humilie ? Vous rappelez-vous cette scène de diplomates français malmenés par Tsahal ? Les diplomates européens font dans leur froc lorsqu’ils s’adressent aux Israéliens. Combien d’installations financées par l’Union européenne en Cisjordanie pour alléger la souffrance des Palestiniens sont détruites par l’occupant sioniste au vu et au su des observateurs ? Le plus comique, c’est que cette UE demande gentiment, humblement, faiblement, leur remboursement et se fait rabrouer comme un caniche dans un jeu de quilles.
Mon antisionisme ? Aider à mettre un terme à cette aventure qui a montré sa dangerosité et l’inaptitude à se réformer, et dont les conséquences toucheront aussi bien les juifs du monde entier. Mais avec ses tueurs du Mossad en embuscade, ses dizaines de milliers de «sayanim », son potentiel militaire et informatique et ses sous-marins nucléaires qui se baladent un peu partout, l’aventure sioniste n’est pas près d’être stoppée. Je dis parfois que Netanyahou est un modéré, et les gens se marrent, mais attendez de voir ceux qui viendront après lui.
J. C.
Ecrivain franco-marocain
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