Des députés illégitimes continuent de légiférer au nom du peuple
Par Houari A. – Une aberration de plus dans la marche difficile vers l’instauration d’une nouvelle République. Ce mardi, au Club des Pins, les mêmes personnes qui ont permis à Abdelaziz Bouteflika de violer la Constitution pour s’assurer une présidence à vie se réunissent pour le destituer.
Se référant à la Loi fondamentale, les tenants actuels du pouvoir se retrouvent ainsi piégés dans une situation héritée du régime au changement duquel les Algériens appellent chaque vendredi en manifestant en grand nombre pour faire entendre leur voix longtemps étouffée par les jeux du sérail.
La réunion des deux chambres du Parlement croupion est une formalité de trop qui retarde la sortie de la crise dont la persistance deviendrait dangereuse pour le pays. D’aucuns estiment que ces atermoiements font partie d’une stratégie qui viserait à contourner les revendications du peuple, en substituant au système rejeté un autre, différent en apparence mais semblable au premier dans le fond.
«Les députés non élus du FLN, du RND, du MPA et de TAJ, cooptés par l’ancien régime, ne représentent pas le peuple et continuent, pourtant, à légiférer en son nom», dénonce un constitutionnaliste pour qui «la mascarade de Club des Pins ne fera qu’aggraver le fossé qui éloigne les gouvernants des gouvernés». «Triturant la Loi fondamentale à sa guise et en fonction de ses appétits politiques, Bouteflika a fait voter en 2008 une Constitution par ses pions placés dans les deux chambres du Parlement dans l’unique but de se maintenir au pouvoir ad vitam ad aeternam. Pour faire avaler la pilule, il a intégré, en 2016, des articles qui devaient éblouir l’opinion publique et lui faire oublier l’essentiel», relève notre source, citant notamment le rétablissement de la limite à deux mandats présidentiels qui rend inconstitutionnel l’allongement de ce nombre de mandats.
Malade, Bouteflika ne comptait sans doute pas se présenter à sa propre succession en avril 2019. «A l’origine, le retour au second mandat non renouvelable avait pour but de faire de Bouteflika le Président dont la longévité au pouvoir ne serait jamais égalée», note notre source, qui confirme ainsi l’affirmation contenue dans le message de ce dernier selon laquelle il ne comptait, sans doute pas, se représenter et que des «forces extraconstitutionnelles» l’y ont poussé.
«Si la rue n’avait pas bougé et si Bouteflika avait eu besoin de faire voter par ses députés une Constitution pour permettre à son frère de lui succéder, par exemple, ils l’auraient fait sans vergogne», confie notre source.
H. A.
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