Discours ambigu
Par R. Mahmoudi – Dans son dernier discours, le chef d’état-major de l’ANP est resté plutôt évasif et indécis sur l’option définitive à adopter pour réussir la période de transition. Son engagement à aider à accomplir de «nouvelles étapes» dans le changement en cours demeure tout aussi flou. Car, comment expliquer qu’il s’engage à soutenir le peuple jusqu’au bout – et même à le protéger contre d’éventuels assaillants – et continuer à plaider, dans le même discours, pour une transition dans le cadre de la Constitution, alors qu’il sait pertinemment que cette option est loin d’avoir les faveurs de ce même peuple ?
En d’autres termes, si son «plan» était de pousser les «3B» qui symbolisent l’ancien clan présidentiel vers la sortie pour satisfaire la revendication pressante du moment, comme il le suggère lui-même, il ne dit pas si c’est pour légitimer ou asseoir une transition politique, comme ne cessent de le réclamer les animateurs du mouvement de contestation, ou simplement pour les remplacer par des figures non impliquées dans l’ancien régime et poursuivre sur la même voie.
Deux explications possibles à cette interrogation : soit il procède par étapes jusqu’à épuiser tous les recours constitutionnels afin de justifier a posteriori l’inévitable recours à la voie consensuelle et, donc, inconstitutionnelle, avec la mise en place d’un collège présidentiel et la dissolution des autres institutions ; soit il essaie de gagner du temps en allumant des contre-feux et en stigmatisant notamment l’ex-chef du DRS, le général Toufik, pour mieux cacher une absence de solutions à la crise qui menace le pays ou, plus grave encore, éluder une confrontation inéluctable avec la population qui, depuis deux mois, demande le départ de «tous» les symboles du système, y compris l’actuel chef d’état-major de l’ANP, dont le nom est autant décrié dans la rue que ceux des symboles du bouteflikisme.
Dans les deux cas, le général Gaïd-Salah et le commandement de l’armée sont tenus à la fois de garantir la stabilité et la sécurité du pays – dans un environnement national et régional de plus en plus complexe – et d’accompagner une transition qui est déjà mal partie, sans avoir à provoquer de nouvelles crises. Mission trop lourde pour le nouvel homme fort du pays, alors que, comme il le dit lui-même, «le temps presse».
R. M.
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