Ces citoyens qui se battaient contre Kamel Chikhi et la pègre sans le savoir
Par Houari A. – En 2014, bien avant le mouvement populaire du 22 février et alors que les affaires scabreuses battaient leur plein sous le règne des Bouteflika, des citoyens se soulevaient contre un projet immobilier dont ils dénonçaient la réalisation dans la banlieue sud-ouest d’Alger.
Les habitants de la cité Les Sources, à Bir Mourad Raïs, s’étaient regroupés plusieurs fois pour appeler les pouvoirs publics à faire cesser les travaux entamés sur un terrain mitoyen qui avait été cédé à un «particulier» en violation de la loi. Ces citoyens ne savaient pas encore que ce «particulier» s’appelait Kamel Chikhi, dit «le Boucher».
Ces citoyens étaient loin de se douter que le bénéficiaire des largesses de l’administration locale n’était autre que le principal accusé dans l’affaire de la saisie, quatre ans plus tard, de 701 kilogrammes de cocaïne au port d’Oran. Au moment des faits, des rumeurs avaient circulé sur un lien supposé du frère de l’ex-Président, Saïd Bouteflika, dans l’affaire de la promotion immobilière qui avait fait couler beaucoup d’encre, sans que les nombreuses actions et protestations des habitants de la cité aient eu un écho favorable.
L’instruction menée par la justice suite à la saisie de la grosse quantité de drogue dure par l’armée aboutira à l’arrestation d’un grand nombre de fonctionnaires et d’élus qui ont touché des pots-de-vin en contrepartie de facilitations auxquelles Kamel Chikhi avait pu avoir accès pour réaliser ses projets pléthoriques avec la complicité flagrante des centres de décisions qui tenaient les rênes du pays d’une main de fer.
Des arbres ont été abattus dans un espace vert de près de 3 000 m2 par Kamel Chikhi et ses protecteurs pour permettre à sa tour de quatorze étages de se dresser comme un défi à la loi.
«Ce terrain convoité depuis longtemps a été cédé par on ne sait quel procédé à un particulier qui l’a hypothéqué auprès d’une banque. Celle-ci, à son tour, pour recouvrer ses créances, l’a vendu à une tierce personne qui n’est autre que le promoteur de ce projet», dénonçait un habitant de la cité dans les médias. Plus grave, le terrain squatté par la mafia appartenait à un organisme public et ne pouvait donc faire l’objet d’une transaction commerciale.
L’avocat des plaignants, Me Khaled Bourayou, avait accusé le wali récemment limogé, Abdelkader Zoukh, d’avoir «autorisé les travaux au mépris des lois en vigueur». «Malheureusement, nous assistons à une dilapidation par des personnes qui ont squatté des terrains, un peu partout, à l’intérieur de cités pour y construire des bâtisses sans que l’autorité bouge le petit doigt», avait-il dit.
Le terrain sera-t-il récupéré par l’Etat ?
H. A.
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