La rénovation de La Casbah retirée à la France et confiée à un pays ami
Par Houari A. – La rénovation de La Casbah d’Alger a été retirée aux Français et confiée aux Cubains qui ont une longue expertise dans ce domaine, a-t-on appris de sources généralement bien informées.
La «revitalisation» de ce quartier historique de la capitale, inscrit au Patrimoine mondial de l’humanité par l’Unesco depuis 1992, a fait l’objet d’une convention tripartite entre la wilaya d’Alger, la région Ile-de-France et les ateliers Jean Nouvel. «Ce projet, qui associera experts français et algériens, inclura notamment la réalisation d’une vision architecturale globale ainsi que la reconversion du palais Dar El-Hamra en équipement culturel métropolitain», indiquait un communiqué de l’ambassade de France en décembre 2018.
Plus de 400 citoyens algériens et français avaient réagi à cette convention tripartite en adressant une lettre ouverte à l’architecte français Jean Nouvel, dans laquelle ils exprimaient leur rejet de celle-ci. «Nous sommes beaucoup à avoir été choqués en apprenant qu’une convention tripartite avait été signée entre la wilaya d’Alger, la région Ile-de-France et vos ateliers afin de, nous dit-on, revitaliser La Casbah d’Alger – étymologiquement, revitaliser implique redonner de la vie, ce qui nous permet de nous demander si la vie, pourtant vibrante, qui caractérise aujourd’hui les rues sinueuses de ce quartier, n’est pas digne d’être considérée comme telle», avaient écrit les signataires de la lettre.
«La Casbah d’Alger, pour nous, bien avant d’appartenir à l’humanité – celle dont on nous dit qu’elle possède un patrimoine mondial – appartient d’abord à ses habitants, qu’ils possèdent un titre de propriété ou non, ensuite aux Algériens dont la lutte révolutionnaire contre le colonialisme français a régulièrement pris appui sur sa capitale, et en particulier sa Casbah, et enfin aux militants anticoloniaux (…) tant La Casbah, par son urbanisme et son architecture, incarne un symbole puissant des luttes de ceux et celles qui ne peuvent mettre à profit que leur passion et leur environnement face aux forces asymétriques que leur opposent les armées et polices coloniales», avaient souligné les signataires.
La lettre rappelait à Jean Nouvel que les Français ont «déjà partiellement détruit [La Casbah] trois fois», estimant que «toute modification de La Casbah qui ne viendrait pas directement de ses habitants doit ainsi faire preuve d’une connaissance et d’un respect sans faille de son passé et de son présent, bien au-delà des instructions que la wilaya d’Alger puisse elle-même fournir ou comprendre».
Les 400 signataires, parmi lesquels des architectes, des historiens, des universitaires et des artistes, avaient lancé un appel à l’architecte Jean Nouvel pour qu’il renonce à ce projet. «N’acceptez pas d’être complice d’une quatrième vague de transformation brutale française de La Casbah. Tout architecte se doit d’être complètement responsable des conditions et conséquences politiques des projets qu’il accepte, toute position qui ferait de lui un simple exécutant constituerait une insulte à sa fonction et à sa capacité d’agir», avaient-ils affirmé, en l’exhortant à se désister et à recommander à la wilaya d’Alger des architectes locaux «qui sauront problématiser ce projet de manière à préserver La Casbah et ce que celle-ci signifie, plutôt que de la contrôler et la modifier».
Réagissant à cette polémique, l’ancien wali d’Alger, Abdelkader Zoukh, a expliqué que le rôle de l’architecte français ne consistait pas à «mener des travaux de réhabilitation» mais à «accompagner la wilaya d’Alger dans cette opération à travers des conseils et des orientations afin que la réhabilitation se fasse de la meilleure manière», ajoutant que les travaux de réhabilitation seraient réalisés avec une main-d’œuvre entièrement algérienne.
H. A.
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