Ce que le message mitigé de Taleb, Abdenour et Benyelles ne dit pas
Par R. Mahmoudi – Annoncée depuis quelques jours en grande pompe, la sortie d’Ahmed-Taleb Ibrahimi n’a pas suscité l’engouement escompté, ni du côté des islamistes dont il est pourtant proche, ni du côté de la rue qui ne veut pas s’identifier à un homme qui ne s’est jamais mêlé au mouvement citoyen, ni même du côté de ceux qui, parmi les partisans du pouvoir, ont ardemment plaidé ces dernières semaines pour une transition sous la conduite d’Ibrahimi.
Le seul avantage de cette sortie est qu’elle a réussi à sortir certains partis de leur léthargie et recentré, du coup, le débat sur la quête d’une solution politique et consensuelle à la crise, au moment où la classe politique peinait à se réunir sur un modus operandi.
Cette initiative est d’abord critiquée dans sa forme. Le choix d’associer deux autres personnalités à son appel est perçu comme un manque d’engagement de la part de Taleb Ibrahimi. Aussi le choix d’un message envoyé à la presse, au lieu par exemple d’une conférence de presse qui aurait conféré à son appel plus de solennité, conforte-t-il l’idée selon laquelle l’ancien ministre des Affaires étrangères ne se voit pas, lui-même, comme l’«homme du consensus» auquel d’aucuns s’étaient empressés de tisser des lauriers.
Sur les questions de fond, l’appel du triumvirat reste très évasif et très superficiel quant au déroulement de la transition à laquelle ils appellent de tous leurs vœux. Les signataires de l’appel se contentent de rejeter l’élection du 4 juillet prochain, tout en pressant le commandement de l’armée à ouvrir un dialogue avec les «représentants» du mouvement de contestation et des forces politiques et syndicales qui s’y reconnaissent, pour trouver une solution à l’impasse actuelle qui, pour eux, doit passer par une «courte transition». Ils ne disent pas toutefois qui seront les représentants du mouvement populaire, ni comment ils seraient éventuellement sélectionnés. Aussi les contours d’un dialogue souhaité entre l’institution militaire et la classe politique ne sont-ils pas définis.
Par ailleurs, les trois «sages» n’expliquent pas dans leur message si eux-mêmes ou un d’entre eux accepteraient de faire partie d’un éventuel collège de direction pour cette période de transition alors que c’est, surtout, sur ce point qu’ils étaient attendus par l’opinion publique.
Il reste à connaître la réaction du chef d’état-major de l’ANP, puisque c’est, en tout cas, à lui que revient la décision d’accepter ou non l’idée d’une transition et de répondre à la proposition des trois personnalités. Il est très possible qu’il le fasse dans son discours attendu pour ce dimanche.
R. M.
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