Ce que l’ancien patron des services secrets français a dit sur les Bouteflika
Par Houari A. – L’ex-patron du renseignement extérieur français, Bernard Bajolet, a affirmé que l’ancien président Abdelaziz Bouteflika et ses frères «sont impliqués dans la corruption». S’exprimant dans un documentaire consacré au mouvement populaire du 22 Février et diffusé sur la chaîne franco-allemande Arte, il a affirmé que «Saïd Bouteflika était appelé Monsieur 15%», allusion à des rétrocommissions qu’il aurait touchées en contrepartie de marchés publics indument octroyés à des hommes d’affaires actuellement emprisonnés.
Bernard Bajolet était ambassadeur à Alger avant d’être rappelé en France où il sera désigné à la tête de la Direction générale de la sécurité extérieure (DGSE), le service d’espionnage français, dirigé actuellement par un autre ancien ambassadeur à Alger, Bernard Emié. Dans son intervention, le diplomate ne donne pas plus de précisions et ne révèle aucun élément d’information sur ce qu’il avance, se contentant d’affirmer que le président déchu et ses deux frères étaient «effectivement» liés aux affaires pour lesquelles de nombreux ministres et autres hauts fonctionnaires sont jugés.
Les accusations de l’ancien ambassadeur de France à Alger confirment, toutefois, que la France était au courant de l’implication de l’ancien régime dans des faits liés au crime économique mais qu’elle a continué de lui accorder un traitement de faveur sans «dénoncer» ce fait pourtant prescrit par les lois internationales. Les autorités françaises ont même montré une certaine complaisance envers le système contre lequel des millions d’Algériens battent le pavé chaque mardi et vendredi pour réclamer sa disparition à jamais et son remplacement par un régime réellement démocratique, affranchi de la tutelle de l’ancienne puissance coloniale.
La France a-t-elle laissé faire pour pousser au pourrissement, sachant que les responsables politiques français n’ont jamais évoqué ouvertement la question de la corruption en Algérie, bien que de nombreuses entreprises françaises y soient implantées, notamment dans les secteurs de l’automobile, de l’industrie pharmaceutique, des hydrocarbures, des finances, etc. ? Ces entreprises sont-elles, elles aussi, impliquées dans ce phénomène ou ont-elles subi le chantage de hauts fonctionnaires ripoux sans réagir au risque de perdre des marchés ?
La déclaration de Bernard Bajolet suscite, en tout cas, de nombreuses interrogations.
H. A.
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