Comment un think tank américain analyse l’impasse politique en Algérie
Par Houari A. – Dans un rapport publié sur son site, le centre américain des études stratégiques Stratfor estime que le rejet des préalables au dialogue en Algérie par le chef d’état-major «porte un coup sévère au mouvement de protestation qui veut réformer radicalement le système politique dans le pays».
Intitulé «Au milieu d’une transition politique, le gouvernement met le pied à terre», le rapport de Stratfor souligne d’entrée que «l’opposition algérienne découvre à quel point elle doit faire pression sur le pouvoir en place». Revenant sur la décision annoncée par le général Ahmed Gaïd-Salah de rejeter les conditions préalables posées par un panel de l’opposition composé de six membres, dans le cadre d’un processus de dialogue, à savoir la libération des prisonniers d’opinion et la levée des mesures de sécurité supplémentaires autour de la capitale, l’auteur note la déception «à peine contenue» des membres du panel, dont deux ont fini par démissionner. «Karim Younès les aurait rejoints mais ses collègues du panel l’ont persuadé de rester», rappelle-t-il.
«Ce rejet, enchaîne le rapport, porte un coup sévère à l’opposition et au mouvement de protestation populaire algérien, qui veut réformer radicalement le système politique du pays. Le gouvernement intérimaire (et surtout l’armée) a clairement fait savoir qu’il ne se plierait pas à un certain nombre de demandes. Dans le même temps, la nature de la réprimande a montré à quel point l’armée est devenue un pilier important du gouvernement. En tant que composante-clé du pouvoir, l’armée algérienne a exercé un contrôle démesuré mais n’a jamais été aussi visible et publique.»
L’auteur du rapport estime à ce sujet : «Pendant ce temps, plus le débat avec le gouvernement intérimaire s’enlisera, plus il risque de perdre sa crédibilité auprès des segments les plus durs de l’opposition. Certains dans la rue ont déjà accusé les membres du panel de servir d’instrument aux mains de l’armée permettant de diluer les revendications de l’opposition, ce qui a motivé les démissions de certains membres cette semaine.»
Commentant les dernières décisions en date prises par les plus hautes autorités politiques en Algérie, le centre des études stratégiques et sécuritaires américain note que la nomination de l’ancien procureur d’Alger Belkacem Zeghmati à la tête du ministère de la Justice «pourrait représenter un choix pragmatique de la part du gouvernement car il est connu pour s’opposer aux loyalistes de Bouteflika» mais ce remaniement est, relève l’auteur, «révélateur du type de décisions gouvernementales qui ont suscité la colère populaire», dans la mesure où le pouvoir transitoire n’a techniquement pas le pouvoir constitutionnel de réorganiser le gouvernement.
H. A.
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