Ces médias lourds suppôts de la contrerévolution
Par S. Khelifati – Nous allons en quelques mots montrer comment le hirak se voit attaquer de manière sournoise ou grotesque, c’est selon, par les médias lourds algériens. Au début du hirak, leur adhésion s’est faite petit à petit en organisant des débats avec des personnalités reconnues par les Algériens comme étant des soutiens au mouvement populaire (tels Bouchachi, Tabou, Boumala, Asoul, Reghas, Rahabi, etc.) et en diffusant les différentes marches du hirak.
Cette activité des médias (à part la chaîne Ennahar) les a rendus sympathiques auprès des Algériens qui les suivaient constamment. Même la chaîne officielle s’était mise au service du soulèvement, grâce à quelques journalistes courageux, et a montré qu’elle était capable de couvrir l’ensemble des marches à travers le pays car elle disposait des moyens pour cela. Cette ambiance donnait de l’espoir quant à l’issue en faveur du mouvement populaire. Malheureusement, Ahmed Gaïd-Salah n’a pas répondu à ce mouvement malgré ses promesses d’appliquer les articles 7 et 8 de la Constitution qui stipulent que le peuple est la source du pouvoir. Ce dernier, ayant promis d’accompagner et de protéger le hirak, commença à «casser» les revendications par petites touches comme le refus d’une transition, l’interdiction de l’emblème amazigh, etc. Après cela, les médias ont petit à petit commencé à fonctionner comme avant le 22 février.
Commençons par l’ENTV. Cette dernière est devenue carrément une chaîne de propagande de l’armée, en diffusant tous les jours les réalisations de celle-ci ; ce qui est quelque part bien mais, malheureusement, au détriment du hirak. Le choix des «citoyens» soutenant Gaïd-Salah lors des journaux télévisés ainsi que les soi-disant «experts» en politique lors des débats est vraiment ridicule, mais le ridicule ne tue pas, comme dirait l’autre. Les autres chaînes dites «privées», à savoir Beur-TV, Dzaïr News, Echourouk TV, El-Bilad, El-Djazaïria One, El-Hayat TV, Numidia, suivirent le chemin de l’ENTV, en commençant à ne plus inviter les personnalités (comme celles citées plus haut) ayant l’adhésion du peuple lors des débats télévisés. Se targuant d’être des chaînes indépendantes parce que nombreuses, elles ont fini par rejoindre l’ENTV, en organisant des soi-disant débats avec des invités bien choisis comme «experts» de la flagornerie. Cette multitude de chaînes leur faisant croire qu’elles sont indépendantes, alors qu’elles reçoivent toutes les instructions d’une même source.
Un même son de cloche retentit chaque jour. Une petite distinction vient de l’émission intitulée «Politique» d’El-Hayat TV. Mais, malheureusement, la ligne des débats est imposée par son animateur (soutenant la tenue des élections le plus vite possible) qui, souvent, interrompt ses invités et impose son point de vue en prenant trop la parole. Bref, cette indiscrétion de ma part sert de critique à cette chaîne.
Ce faisant, toutes les chaînes citées, s’accordant toutes pour un dialogue inclusif, servent en fait la contrerévolution et ceci pour trois raisons essentielles. Premièrement, elles ont toutes exclu le hirak, pour ne pas dire le peuple, en ne diffusant plus les images des marches des vendredis et des mardis. Même lors de leurs journaux télévisés, elles balbutient quelques phrases inaudibles. Deuxièmement, elles ont toutes exclu de leurs «faux débats» toutes les figures citées plus haut et reconnues par le peuple. Même Rahabi, le modéré, est effacé. Troisièmement, et c’est la raison la plus grave, les partisans d’une période transitoire avant des élections n’ont plus droit à la parole. Seuls ceux soutenant la proposition du pouvoir, c’est-à-dire l’élection présidentielle dans les plus brefs délais, sont les bienvenus et tous avec les mêmes arguments.
Comment appeler tout ça, si ce n’est de l’exclusion, alors qu’elles se vantent d’être ouvertes à un débat inclusif ? Balivernes ! Plus grave encore, ces chaînes ont fermé la porte aux jeunes qui commençaient à émerger sur le plan politique. Les débats du début sur le hirak les plus intéressants étaient ceux où des jeunes étaient invités et qui n’avaient pas la langue dans leur poche. Or, on parle souvent de représentants du hirak et on débat sur la manière de les faire émerger sans leur donner la parole. C’est cela, en gros, le rôle contrerévolutionnaire des médias lourds. Ont-ils été menacés ? Soit ! Nous sommes en pleine révolution et quelle que soit la raison de leurs actes, celle-ci se fait avec ou sans eux. Mais, en y regardant de plus près, ces chaînes, de par leur ligne éditoriale dictée par leurs propriétaires, on peut dire qu’elles sont devenues contrerévolutionnaires.
Je termine cette analyse en disant que je regarde de plus en plus les chaînes Al-Magharibia et Amel-TV qui, malgré mon désaccord avec leur ligne et certaines manipulations des images, nous permettent de suivre les événements sur le hirak. A ces chaînes s’ajoute Al-Jazeera Mubasher les vendredis et les mardis qui nous montre que le hirak est bien là.
S. K.
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