Horreur et incurie
Par Saïd N. – Comme si le malheur qui les avait frappés au stade du 20-Août, lors de ce sinistre gala de Soolking, n’était pas déjà suffisamment douloureux, il leur fallait encore subir l’ignominie de cet imam d’une mosquée de Kouba qui, poussant l’outrecuidance à son extrême, jugea devant un public abasourdi et impuissant que la jeune Sofia, décédée la veille dans la bousculade, ne méritait pas que l’on priât pour elle, parce que, selon sa perception débile, elle était morte dans une fête où il y avait de la mixité et de la danse.
Ce triste individu, payé par l’argent du contribuable, s’est même permis, d’après des témoins présents au sermon, de tancer les parents de la petite, sans soulever la moindre réaction.
D’où nous sort ce monstre ? Des mosquées entretenues par l’Etat et livrées peu à peu aux fractions les plus réactionnaires et les plus irréductibles du salafisme. L’ex-ministre des Affaires religieuses, Mohamed Aïssa, nous avait averti depuis longtemps contre la montée des extrémistes à partir des mosquées du pays dont ils détiennent – c’est lui-même qui l’a avoué – la majeure partie. Mais rien n’a été fait apparemment pour circonscrire le péril.
Aussi le syndicat des imams en avait-il fait état à maintes occasions et alerté contre le risque de basculement de nombre d’entre eux, à cause de leur situation sociale jugée précaire. Le déclenchement du soulèvement populaire du 22 Février a occulté momentanément le conflit larvé autour des lieux du culte mais le délitement accéléré des institutions, aggravé par l’illégitimité et l’incurie du pouvoir politique en place, fait remonter d’un coup toutes les horreurs refoulées. Le pire est à craindre…
S. N.
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