Embarrassante hâte
Par Houari A. – En émettant le «souhait» que le corps électoral soit convoqué le 15 septembre, Gaïd-Salah met deux personnes dans l’embarras : le chef d’Etat intérimaire Abdelkader Bensalah, en tant que chef d’état-major de l’armée, et le Premier ministre Noureddine Bedoui, en tant que vice-ministre dans le gouvernement hérité du régime Bouteflika.
Si dans les heures et les jours qui suivent Bensalah annonce la tenue de l’élection présidentielle à l’échéance révélée par le chef de l’armée ce lundi, il confirmera qu’il ne détient aucune des attributions qui lui sont conférées par la Constitution, bien que celle-ci ne soit plus en vigueur à partir du moment où le peuple n’en reconnaît que les articles 7 et 8.
Le chef d’état-major semble avoir été contraint de faire son annonce dans la précipitation, malgré les remous que celle-ci va provoquer. Pourquoi Gaïd-Salah a-t-il «souhaité» que la présidentielle se tienne à une date aussi rapprochée ? Trois raisons pourraient avoir concouru à cette convocation hâtive d’électeurs qui, il le sait, répondront par un boycott massif.
D’abord, l’état de santé du chef de l’Etat provisoire qui pourrait s’être dégradé, Abdelkader Bensalah étant atteint d’une maladie grave. Un décès de celui qui, jusque-là, garantit une sorte de «légitimité» au pouvoir militaire chamboulerait la feuille de route des décideurs actuels qui cherchent désespérément à se donner l’image de «gardiens du temple» qui «veillent au respect de la Loi fondamentale» et qui «ne nourrissent aucune ambition politique personnelle». Une disparition de Bensalah leur ferait perdre un temps supplémentaire, conscients qu’ils sont que plus la crise dure, plus ils s’enfoncent dans la transgression de la Constitution dont ils affirment vouloir respecter les articles «à la lettre».
Autre raison possible, des pressions étrangères. On a vu, en effet, deux ambassadeurs s’afficher après que les chancelleries étrangères se sont murées dans un silence de cathédrale en réaction au rejet par le Mouvement de contestation de toute ingérence étrangère dans les affaires internes du pays. Mais la crise s’éternisant, il est probable que certains partenaires de l’Algérie aient fait part de leur crainte de voir le pays s’enliser dans une instabilité durable dont on commence à entrevoir les premiers signes, sur le plan économique notamment.
Enfin, les déboires du panel mis sur pied pour amorcer un dialogue au nom du pouvoir a pu inciter ce dernier à biffer cette étape inscrite sur sa feuille de route et à aller directement à la dernière ligne : l’organisation manu militari d’une présidentielle dont la date a été annoncée à partir d’une caserne.
H. A.
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