Pourquoi le pouvoir veut des élections bien qu’elles soient impossibles
Par Mohamed K. – Dans son nouveau discours, le chef d’état-major de l’ANP semble plus que jamais déterminé à imposer l’option des élections, en disant que celles-ci auront lieu dans les temps impartis, «qu’on le veuille ou non» et «quelles que soient les difficultés et les sacrifices».
L’usage de mots aussi durs qu’inhabituels trahit une certaine fébrilité chez les tenants du pouvoir. D’abord, parce que le général Ahmed Gaïd-Salah a, pour la deuxième fois en quelques semaines, clairement empiété sur les attributions constitutionnelles du chef de l’Etat, étant donné que toute convocation du corps électoral pour les élections relève exclusivement du président la République élu ou du chef d’Etat intérimaire. En narguant de cette façon le chef de l’Etat, le commandement de l’institution militaire prend le risque de consacrer l’illégalité dans la gestion de la transition actuelle.
Dans le même temps, le chef d’état-major, par sa sortie, met l’instance de dialogue et de médiation dans une situation embarrassante, dans un sens où celle-ci n’a même pas encore franchi la première étape du processus, qui est celui du dialogue et des consultations avec les différents acteurs politiques et associatifs. Plus grave, son président, Karim Younès, se montre de plus en plus sceptique quant aux chances d’aboutissement de sa démarche. Pour montrer son désarroi et celui de son équipe, il a révélé que certains d’entre eux auraient reçu des menaces de morts.
Cette fébrilité dans le discours de Gaïd-Salah s’expliquerait également par la crainte de la réaction de la rue qui connaît, depuis quelques semaines, un second souffle et qui ira certainement en s’amplifiant dans les prochaines semaines. Le pouvoir sait que si la mobilisation se maintient à ce niveau jusqu’à la fin de l’année, il lui sera très difficile, voire impossible de tenir ses élections dans les délais qu’il s’est fixés. Il sait aussi qu’un nouveau report du scrutin donnera un coup de grâce à ce qui reste de sa légitimité. Que va-t-il faire dans ce cas ? Mystère.
M. K.
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