Le successeur du général Gaïd-Salah devra écouter le peuple
Par Rabah A. – La fuite de Tliba à l’étranger, le nouveau et puissant souffle qu’affiche le Hirak ainsi que le séjour prolongé de Gaïd-Salah à Oran sont de bon augure et semblent indiquer qu’il a été demandé ou conseillé à celui-ci de faire une halte en attendant qu’une analyse plus objective, réaliste et froide de la crise qui prévaut en Algérie soit faite en tenant compte, bien sûr, des nuages noirs qui commencent à s’amonceler au-dessus du ciel jadis bleu de notre pays.
On n’a nul besoin d’être un grand clerc ou un diplômé de Harvard pour comprendre que le haut commandement militaire est en train de faire du surplace à cause d’une mauvaise évaluation de la situation née de l’avènement du Hirak et du jusqu’au-boutisme de Gaïd-Salah. Les collaborateurs de celui-ci l’ont suivi dès le départ parce qu’ils lui doivent d’abord et avant tout leur arrivée à leurs postes. Ils ont marché aussi par peur, pour certains, de ses réactions violentes et de son langage outrancier, et, pour d’autres, par respect pour son âge et ses très longues années de service dans l’institution.
Toutefois, tous sont convaincus que si Saïd Bouteflika n’avait pas décidé de le dégommer, c’est la feuille de route proposée par ce dernier au nom de son frère qui aurait été appliquée avec l’appui sincère, total et inconditionnel du chef d’état-major. Mais, hélas, ainsi sont faites les choses. Demain, si Gaïd-Salah part, son successeur, au vu de l’immense gâchis engendré par la gestion catastrophique de la crise, devra écouter le peuple et composer avec lui pour sauver ce qui pourra l’être et prendre un nouvel élan pour un départ qu’il faudra réussir cette fois.
Trop de temps a été perdu par la faute d’un général d’avide de pouvoir et qui voulait gérer un grand pays comme le nôtre comme on gérerait une caserne. Trop d’énergie a été gaspillée inutilement depuis le départ forcé de Bouteflika, alors que la solution de l’application des articles 7 et 8 de la Constitution était là à portée de main et elle aurait permis à notre pays, si elle avait été mise en branle, de faire un grand pas en avant sur le chemin de la construction d’un pays doté d’institutions légitimes, efficaces et pérennes. Aussi, le successeur de Gaïd-Salah devra être choisi parmi les chefs militaires instruits et propres qui croient aux vertus du dialogue et qui savent tendre une main franche et honnête à leurs frères pour préparer une transition qui, à terme, devra entraîner le retrait définitif de l’armée de la sphère politique pour ne s’occuper que de la défense de l’intégrité du pays et de la défense des frontières.
Pour sa part, Gaïd-Salah devra être jugé par un tribunal populaire doté de tous les pouvoirs d’une juridiction normale. Il devra répondre de l’incarcération injuste et injustifiée de dizaines de personnes et d’opposants politiques dont le seul tort est d’avoir osé brandir l’emblème amazigh ou de l’avoir critiqué. Il devra être condamné aussi pour avoir empêché des milliers d’Algériens de se déplacer librement dans leur pays. Il devra s’expliquer également sur son comportement néfaste voire criminel qui, en stigmatisant une région du pays, a permis l’apparition de profondes fractures et d’un racisme décomplexé qui s’affiche en plein jour. Le reste des méfaits de cette personne concernant sa prédation et celle de sa famille ainsi que son immoralité dépendront, quant à eux, d’une Cour qui statuera en matière criminelle. Ce jugement devra, à l’avenir, servir d’exemple pour empêcher toute velléité de prise de pouvoir par la force. Ce n’est qu’à ce prix que l’Algérie pourra tourner la page de cette dérive qui dure depuis 57 ans.
Enfin, il appartiendra aux nouvelles autorités de libérer les prisonniers d’opinion et de les indemniser pour les dommages qu’ils ont subis. Quant aux autres détenus, il faudra leur garantir un jugement équitable et loin de toute idée de vengeance. Ce jugement devra amener les personnes qui auront été reconnues coupables de malversations et de détournements à rembourser les sommes et les biens détournés pour les réinjecter dans l’économie du pays pour le bien de tout le peuple algérien.
R. A.
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