Ces hauts fonctionnaires revanchards qui tournent le dos au peuple
Par Rabah A. – La fonction judiciaire en Algérie ne cessera jamais d’intriguer car les mêmes magistrats qui, hier seulement, se plaignaient de la tyrannie et de la malhonnêteté de Tayeb Louh, sont aujourd’hui en train de faire pire que ce dernier et se comportent comme de véritables potentats. Ainsi, le cas de l’actuel soi-disant ministre de la Justice et Garde des sceaux est révélateur du degré avancé de pourrissement qu’a atteint la justice algérienne. Donc ,voilà un ancien procureur général près la Cour d’Alger dont le seul haut fait d’armes est d’avoir transmis conformément aux instructions du général Toufik à son ministre de tutelle un mandat d’arrêt international annulé juste après et qui se retrouvera, par la suite , en guise de sanction, à la Cour suprême où il s’imposera le silence le plus total quand Chakib Khelil faisait en fanfaronnant le tour des zaouïas du pays.
Ce haut fonctionnaire qu’on croyait abattu et démoralisé, en fait, rongeait son frein et attendait son heure et une offre de service quelle qu’elle fût, pourvu qu’elle lui permît de se replacer et de prendre sans aucun état d’âme sa revanche. Cette opportunité n’a pas tardé à se présenter par la grâce du Hirak qui a permis à celui qui deviendra par la suite son mentor, à savoir Gaïd-Salah, de le repêcher pour exploiter ses rancœurs et en faire, en le nommant à la tête du département de la justice, désignation dont il n’aurait jamais rêvé même dans ses fantasmes les plus débridés, son exécutant des basses besognes.
Cependant, cette désignation en elle-même était inconstitutionnelle car le Président par intérim n’a pas le droit de démettre un membre du gouvernement et de nommer quelqu’un d’autre à sa place. D’ailleurs, à ce propos, le cas de l’ancienne ministre de la Culture est révélateur de cette situation, puisque celle-ci a démissionné mais son poste est présentement occupé par le ministre de la Communication qui dirige ainsi les deux ministères. Qu’à cela ne tienne, Gaïd-Salah ne s’embarrasse pas de ces «foutaises» juridiques et oblige le «preux» Bensalah à signer un décret de nomination illégal parce que non conforme au texte même de la Constitution. Donc, nous voilà avec un nouveau ministre qui s’empressera de renvoyer l’ascenseur à son chef direct en se fendant de plusieurs discours où il l’encensera et louera son patriotisme et ses choix «judicieux».
Mieux encore, ce même ministre illégitime confectionne pour asseoir son autorité et envoyer à qui de droit des messages d’allégeance, un mouvement inédit depuis l’indépendance dans le corps des magistrats. Une première question s’impose : est-ce qu’un ministre dont la nomination s’est faite en violation de la Constitution peut valablement prendre des décisions qui engagent l’avenir du département le plus vital de la République et, par là même, celui de toute l’Algérie ? Deuxième question : étant lui-même magistrat de formation, comment a-t-il accepté de fouler à ses pieds avec autant de légèreté, pour ne pas dire de mépris, le texte fondamental du pays qu’il prétend aujourd’hui protéger ?
Cette culture de la revanche se retrouve à tous les étages de la République algérienne puisque même l’actuel président de la Cour suprême a eu à subir une assez longue traversée du désert après son départ forcé de l’administration de l’APN qu’il n’a jamais digéré. Il en est de même pour le directeur de cabinet de Bedoui qui a occupé auparavant plusieurs postes de wali avant d’être mis sur la touche à la suite de paroles jugées «irrévérencieuses» à l’égard d’insatiables moudjahidine. Celui-ci, en dépit de son ancienneté, a accepté, pour reprendre du service et espérer un jour terminer en beauté, de se mettre sous la coupe de quelqu’un qui a terminé sa scolarité à l’ENA des années après lui et dont la tête est réclamée par des millions d’Algériens. Il y a aussi l’exemple de cet ancien ambassadeur en Argentine qui est tout fier aujourd’hui d’occuper le poste de secrétaire particulier de Bensalah et il existe des dizaines de cas similaires aussi bien dans le civil que dans l’armée.
Ces hauts fonctionnaires obnubilés par le poste, ses avantages et leur position dans la hiérarchie ne voient-ils pas qu’ils tournent le dos au peuple pour suivre un pouvoir illégitime ? Ne font-ils pas confiance à ces millions de citoyens qui battent le pavé régulièrement pour que l’Algérien reconquière son indépendance et soit fier de son pays ? Savent-ils que par leur attitude ils légitiment tous les emprisonnements arbitraires et toutes les mesures attentatoires à la liberté et à la dignité humaine qui ont été prises par des putschistes ?
Toutes ces personnes seront démasquées un jour prochain et elles porteront l’entière responsabilité de leur collusion et de leur collaboration avec ce pouvoir illégal. A ce moment-là, personne ne pourra prétendre qu’il ne savait pas où qu’il était un simple petit exécutant.
On n’a pas encore entendu, depuis le début de ce soulèvement pacifique historique, parler de démission ou de départ volontaire dans les hautes sphères de l’Etat comme cela se fait ailleurs. Le motif qui pourrait être invoqué serait la culture qu’ont ces gens de la «nécessaire perpétuation de l’Etat». Or, cet argument est irrecevable quand il s’agit de servir une clique qui s’est approprié l’Etat au lieu de reprendre sa place naturelle au sein du peuple.
Faut-il autrement croire que ces messieurs de la haute administration font partie du clan et ont peur de scier la branche sur laquelle ils sont assis ou qu’ils ne font pas suffisamment confiance à ce tsunami qu’ils analysent faussement comme un mouvement éphémère ou un simple effet de mode ? Une chose est sûre et l’histoire humaine est là pour l’attester : les peuples ont toujours fini par triompher et, s’agissant de notre pays, un très prochain dénouement heureux est inéluctable surtout que nous avons dans nos rangs un baroudeur de la première heure de la trempe de Bouregaâ qui a donné cette semaine une leçon inoubliable de bravoure, de patriotisme et de dignité aux faussaires qui voulaient le juger.
R. A.
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