Issad Mabrouk : «Chaque juge est responsable du traitement réservé aux affaires qui lui ont été soumises»
Par Mounir Serraï – Le nouveau secrétaire général du Syndicat des magistrats, Issad Mabrouk, reconnaît que la détention provisoire infligée à des dizaines de détenus d’opinion ne peut être qu’une exception, appelant les citoyens à patienter encore une à deux semaines pour corriger cette situation.
Dans une déclaration à la presse lors d’un nouveau rassemblement tenu devant la Cour suprême à Alger, Issad Mabrouk assure que les juges traitent des dossiers, qu’ils soient ceux des détenus du Hirak ou autres. «Chaque juge est responsable de la suite qu’il donne au dossier qui lui a été soumis. Les décisions portent son nom. Et il sera comptable devant l’histoire de son respect strict ou pas de la loi», dit-il. Il précise dans ce sillage que la grève illimitée ne vise nullement l’obtention par les juges de privilèges. Bien au contraire. Les magistrats, assure-t-il, exigent des instruments leur permettant d’exercer leur profession sans pression, ni injonctions.
«L’indépendance de la justice est au cœur d’un vif débat de société. Beaucoup d’Algériens doutent de son indépendance. Nous ne pouvons fermer les yeux sur les aspects négatifs. Bien au contraire. Il faut faire tout pour les traiter afin que la justice soit rassurante pour tous les Algériens, quel que soit leur statut ou leur position sociale. Nous espérons atteindre cet objectif avec la participation de tout le monde», ajoute Mabrouk selon lequel «les magistrats ne demandent pas des privilèges mais une assise forte qui leur permettra de garantir les droits de tous les Algériens».
«Le procès équitable exige que le magistrat obéisse à la loi, et uniquement à la loi, et à sa conscience. Celui qui doit évaluer le travail du juge, le féliciter ou le sanctionner est le Haut Conseil de la magistrature. Cette haute institution a été dépouillée de ses pouvoirs…», dénonce-t-il.
«Nous n’allons pas parler des salaires durant cette période, parce que nous ne sommes pas égoïstes. Nous pouvons même accepter de travailler gratuitement, mais nous refusons que l’on touche à notre dignité ou qu’on nous humilie. Nous voulons baliser le terrain pour la construction d’un véritable Etat de droit. L’indépendance de la justice est une revendication de tout un peuple», insiste Mabrouk qui fait état de la poursuite du mouvement de grève enclenché dimanche dernier, deux jours après l’annonce d’un large mouvement dans ce corps.
«Ce rassemblement vient après ce mouvement de protestation historique par lequel ils ont exprimé leur mécontentement quant à la situation dans laquelle se trouve le secteur de la justice. Nous n’avons pas trouvé d’issues avant de recourir à ce mouvement de grève. Il semble que notre protestation est quelque peu violente, mais les solutions radicales s’imposent quand les portes du dialogue restent fermées et quand ton interlocuteur cherche à imposer son point de vue, quel que soit le coût», affirme Issad Mabrouk, pour lequel «ce mouvement n’a été que la goutte qui a fait déborder le vase», souligne-t-il, relevant que «les problèmes dont souffrent les magistrats sur le plan professionnel et social sont multiples et, surtout, connus du grand public. Mais ces problèmes n’ont pas été résolus. Les solutions proposées étaient souvent conjoncturelles et inadéquates».
M. S.
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