Zeghmati exécute l’ordre de Gaïd-Salah et veut intimider les juges grévistes
Par Nabil D. – A peine a-t-il reçu l’ordre d’«aller jusqu’au bout» du vice-ministre de la défense que le garde des Sceaux a entamé une opération visant à «liquider» les magistrats ayant décidé de recourir à la grève pour protester contre l’hégémonie du pouvoir exécutif sur l’appareil judiciaire.
Ainsi, apprend-on, Belkacem Zeghmati a adressé une note à ses subordonnés leur enjoignant de lui faire parvenir la liste exhaustive des juges grévistes. C’est donc conforté par le soutien de l’armée que le ministre a décidé de passer à l’offensive, quitte à déstabiliser tout un secteur, l’essentiel étant que la présidentielle voulue par Gaïd-Salah pour le 12 décembre ne soit pas perturbée.
Ce dernier épisode dans le feuilleton de la justice qui s’est mise docilement sous la férule du commandement de l’armée, prononçant des verdicts extravagants dictés par Gaïd-Salah, est venu confirmer une fois pour toutes que les tribunaux sont devenus des chambres d’enregistrement dénuées de toute prérogative, sinon celle d’emprisonner les opposants au régime dans des parodies de procès expéditifs.
La grève générale illimitée des juges est née dans le sillage du Mouvement de contestation populaire, quand bien même elle a été provoquée par la décision prise unilatéralement par le ministre de la Justice d’opérer une purge au sein de ce secteur, décrié par les citoyens pour sa complicité avec les tenants du pouvoir politique actuels. Aussi les exigences des magistrats qui, au départ, ne concernaient que les aspects liés à la profession, ont-elles débordé sur la revendication politique, les juges appelant à s’affranchir du joug du pouvoir exécutif pour mener à bien leurs missions constitutionnelles.
Le bras de fer qui opposait les magistrats au ministre s’étend ainsi, désormais, et porte en son sein les germes d’une insurrection contre le chef d’état-major de l’armée qui a apparu, encore une fois, comme le véritable chef de l’Etat autoproclamé lors de la cérémonie célébrant le déclenchement de la Révolution du 1er Novembre qui a réuni les symboles du système et leur clientèle au Palais «du peuple».
Il reste à savoir jusqu’où iront les juges dans leur sursaut d’orgueil pour s’émanciper et libérer la justice du joug du pouvoir politique dont les tenants les brident pour échapper à la loi.
N. D.
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