Comment éradiquer le marché parallèle de la devise
Par Mohamed Sayoud – Les facteurs contribuant à l’extension du marché parallèle des devises sont les besoins de plus en plus nombreux des citoyens algériens des biens et services qu’on ne trouve pas en Algérie, comme le hadj, l’omra, le tourisme à l’étranger, le business du cabas (contrebande), l’achat des biens immobiliers à l’étranger, les études et les soins à l’étranger, la sous-facturation, etc. En ce qui concerne les services, les voitures, les différentes pièces pour véhicules et industries, les biens immobiliers à l’étranger, etc., ce qui fait le plus de mal c’est la partie liquide que les importateurs de la vente en l’état remettent à leurs fournisseurs étrangers.
L’incapacité des gouvernements successifs à éradiquer ce fléau économique vient du fait qu’ils n’ont aucune prérogative pour prendre des décisions dans ce sens.
Il n y a aucun obstacle à ouvrir les bureaux de change, mais le problème réside dans le fait qu’ils ne serviront à rien puisqu’ils vont suivre la loi de l’offre et la demande, dans la mesure où les cours seront les mêmes et légaliser la spéculation serait une aberration.
Les sources de devises échangées sur le marché parallèle sont les émigrés et les apports insignifiants des retraités et de titulaires des pensions. Auxquels s’ajoute une certaine catégorie d’exportateurs hors hydrocarbures qui triche en minorant la valeur de la facture de leurs exportations. Aussi bien l’importateur que l’exportateur utilisent la manœuvre de la minoration et leurs intérêts opposés se rencontrent en parfaite harmonie sur le marché noir de la devise. L’importateur en position de demandeur et l’exportateur en position d’offreur.
Les autres sources sont la surfacturation des intrants, les ports secs qui ont des tarifs exorbitants dont une partie part à l’étranger via les compagnies maritimes étrangères qui gonflent leurs prestations, le SKD/CKD (voitures, véhicules, tracteurs, électro-ménager, IT, téléphones, etc.), les produits et matières premières non taxés ou faible taux douaniers à 5%, les es salaires gonflés pour le personnel des compagnies étrangères et la surfacturation sur les machines et lignes de production qui bénéficient de l’ANDI.
Les émigrés, les binationaux qui voyagent régulièrement entre l’Algérie et l’étranger, certains opérateurs économique du commerce extérieur qui peuvent accéder au change officiel et qui préfèrent revendre une partie du montant dans l’informel pour profiter du gain d’environ 50% par rapport au taux officiel pour échapper aux systèmes de contrôle fiscale, ce qui leur permet de réduire la TVA, la TAP et l’IBS et droit douanier, participent également à alimenter le marché parallèle de la devise.
Le marché parallèle de la devise est loin d’être une simple place de changes et d’échanges ; c’est une chaîne d’inefficacités fiscales, douanières, réglementaires, économiques et monétaires. L’importateur qui, afin de payer moins d’impôts et moins de droits de douanes, taxes proportionnelles au chiffre d’affaires et au montant de la facture d’import, est poussé à manœuvrer et à faire des fausses déclarations de valeur. En clair, l’importateur minore la facture du produit importé et transfert par voie légale. Grâce au marché parallèle, il a pu trouver le moyen de payer par valise son fournisseur et, par prolongement, fuir ces taxes fiscales et douanières.
Les agences de voyages qui, à défaut de bénéficier du droit au change, recourent elles aussi aux devises du marché noir où elles s’approvisionnent à coup de milliards d’euros.
Eradiquer ce cancer économique, c’est mener une véritable guerre contre l’argent sale, toucher certains intérêts occultes. C’est un vrai combat économique pour les vrais Algériens qui aiment véritablement leur pays, qui croient en son avenir de prospérité et de développement, qui ont la certitude que ce pays recèle d’immenses potentialités à mettre à la disposition des futures générations.
La solution réside dans la devise elle-même. Mettre celle-ci à la disposition de celui qui la cherche éliminera automatiquement celui qui la vend au marché parallèle. L’étudiant pour suivre ses études peut l’acheter au taux officiel. Ceci est valable aussi pour le malade pour se soigner, pour le touriste qui veut prendre des vacances. Une allocation touristique de 1 000 à 2 000 euros pour chaque Algérien qui se rend à l’étranger, de meilleurs droits au change aux malades transférables à l’étranger ainsi que la possibilité aux professionnels du tourisme, notamment les agences de voyages, d’accéder à la devise bancaire sont des éléments à considérer par les autorités afin de mettre fin au change parallèle.
Il y a lieu de prendre en charge d’une manière légale et générale ces besoins pour un certain temps et tout rentrera dans l’ordre parce tous les dinars ne peuvent pas être épuisés et un besoin en monnaie nationale s’en fera ressentir. La contrebalance en faveur du dinar va jouer son rôle pour stabiliser le marché à l’image et l’exemple du Maroc et de la Tunisie.
Il faut construire une économie saine qui a pour base une fiscalité assouplie. Une tarification douanière raisonnable avec une meilleure accessibilité au change officiel, une libéralisation plus prononcée de l’économie nationale pourraient assécher les besoins du recours au marché parallèle.
Comment compenser le montant d’environ 6 milliards pour le change officiel ?
En régulant le marché des devises, la demande au marché noir sera anéantie, éradiquée, car il n’y aura plus de demande.
Il reste le montant assez important des importateurs de la vente en l’état. Il doit y avoir un contrôle rigoureux afin de bien vérifier les prix et les quantités de la déclaration des marchandises importées et punir sévèrement les fraudeurs. L’Etat doit créer un comité indépendant pour contrôler la douane afin d’éradiquer la sous-facturation qui nuit à l’économie algérienne vu le manque de recettes en TVA et pour le Trésor public et qui bloque l’émergence d’une véritable dans notre cher pays. Il faut aussi contrôler les grossistes des produits importés (factures de vente et d’achat avec TVA, traçabilité de la provenance de la marchandise).
Avec tous ces contrôles, plus de la moitié des importateurs de la vente en l’état vont mettre fin à l’import et seraient intéressés de monter des unités de production en Algérie, ce qui va réduire l’importation (les dépenses en devises) et créer des milliers d’emplois et la richesse.
L’Algérie doit faire très vite pour faciliter et encourager l’investissement qui est le poumon de l’économie. Mais il reste encore à créer et construire des zones industrielles clé-en-main et des zones franches afin de booster la production nationale. Il est donc urgent de lancer une réforme économique du dinar, en encourageant et en facilitant l’investissement afin d’avoir une économie forte et une monnaie forte.
La dévaluation du dinar est néfaste à l’économie algérienne, pour le pouvoir d’achat. Elle décourage et dissuade l’investisseur à acheter les équipements et les machines de l’étranger car il y a des impacts négatifs et il leur faut des sommes colossales en dinar, ce qui est souvent le cas. Une démarche non rentable car il faut plusieurs années pour amortir ces investissements.
M. S.
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