Sofiane Djilali : «Structurer le Hirak en un mouvement unique est une aberration conceptuelle»
«Le Mouvement populaire a atteint un seuil critique qui interpelle dorénavant toute la société politique […] pour garantir le passage définitif à l’Etat de droit et à la démocratie», a affirmé Sofiane Djilali dans une contribution parue dans les colonnes du quotidien El-Watan. «Dans une situation aussi complexe que celle du pays, il ne peut y avoir de réponse unique aux préoccupations légitimes d’une société à la recherche de son avenir», a-t-il souligné, en précisant qu’«il n’y a pas de doute qu’un nouvel état d’esprit règne sur le pays».
Le président de Jil Jadid estime qu’une structuration du Hirak en un mouvement unique est une «aberration conceptuelle», car «elle nie tout simplement la demande populaire de la démocratie» en ce sens qu’elle confine à «l’embrigadement». «Comment peut-on vouloir la démocratie et organiser en même temps un peuple au sein d’une même structure en lui déniant, ce faisant, le droit à la pluralité ? Comment peut-on désigner des représentants d’un peuple pour les cantonner dans la position d’un interlocuteur face à un pouvoir d’Etat ? Le peuple élit des dirigeants d’un pays et non pas des porte-parole pour quémander des droits», a-t-il insisté, en notant que «le terrain lui-même confirme ces appréhensions».
Sofiane Djilali regrette que «dans ce qui s’apparente aujourd’hui à l’opposition», les fractures y soient «profondes» et les contradictions «à fleur de peau» en dépit des nombreuses réunions des partis qui n’ont abouti à aucun résultat parce que «l’équation a été mal posée». Aussi le président de Jil Jadid préconise-t-il la mise en place de «superstructures» dont la société civile et l’ensemble des partenaires politiques pourraient en être la «pierre angulaire», en appelant les participants à cette initiative à «éviter la confrontation des contenus politiques» et à «se mettre d’accord sur le contenant démocratique, sous l’égide de partenaires neutres». «Un accord général sur des règles du jeu démocratique au sein de l’opposition dans son sens le plus large pourrait devenir un instrument de négociation efficace face au pouvoir en place», a-t-il souligné.
Pour Sofiane Djilali, les partis politiques sont «l’échine de la démocratie» car, argue-t-il, «pour animer une démocratie, il est nécessaire d’avoir des hommes et des femmes politiques capables d’assumer leur rôle». «Si le Mouvement populaire veut concrétiser un projet d’Etat de droit et de démocratie, il doit s’en donner les moyens. Il faut envisager l’avenir en cohérence avec ses objectifs stratégiques et non pas dans une cacophonie qui finira par lasser tout le monde», met-il en garde, en estimant que «le moment est venu pour que les Algériens s’engagent en politique en tant que citoyens recherchant le bien commun» pour faire émerger une élite qui doit «réfléchir comment construire l’avenir et non pas seulement comment empêcher tel ou tel événement particulier de se produire», conclut-il.
N. D.
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