Ils esquivent la question de l’armée : ces cinq futurs trois-quarts de Président
Par Abdelkader S. – Les cinq candidats à la présidentielle du 12 décembre poursuivent leur campagne électorale sur laquelle se braquent tous les médias à la solde du pouvoir pour donner la fausse image d’une adhésion massive à cette élection imposée par l’état-major de l’armée. Or, en parlant de l’armée justement, tout le monde aura constaté qu’aucun des cinq prétendants à la fonction suprême n’aborde la question de l’institution militaire, ni le sort qu’ils comptent réserver aux généraux octogénaires qui règnent à sa tête sans partage.
«Ce silence est la preuve, s’il en est, que les cinq candidats sont le pur produit du système et qu’ils ont tous reçu la bénédiction de Gaïd-Salah avant de se jeter à l’eau et de prendre part à une élection qui risque pourtant de ne pas avoir lieu», indiquent des sources informées qui se disent certaines qu’aucun des cinq candidats «admis à la cour» par Gaïd-Salah ne sera en mesure de «tenir tête au commandement actuel de l’armée avec lequel il devra composer et sous les ordres duquel il occupera le poste fictif de président de la République. Le successeur de Bouteflika sera, comme lui, un trois-quarts de président», ironisent nos sources.
L’armée est une question taboue au sein du système que ses résidus essayent de sauver. Dans l’opposition et chez les millions de manifestants qui réclament un changement politique radical et un nouveau mode de gouvernance affranchi des archaïsmes qui tirent le pays vers le bas, la conviction que l’armée devra être placée sous une autorité civile devient un impératif incontournable pour éviter que les dérives dictatoriales actuelles se répètent et que l’institution se mêle à nouveau d’un domaine qui ne relève pas de ses attributions.
«La future Constitution devra clarifier davantage le rôle de l’armée, en délimitant ses prérogatives et en donnant la primauté au civil sur le militaire», soulignent nos sources qui rappellent que l’institution militaire «a, à chaque fois que les politiques ont lamentablement échoué, été mise au-devant de la scène malgré elle pour corriger les errements des décideurs, comme cela fut le cas en octobre 1988 et en janvier 1992». «Mais, cette fois-ci, la situation est encore plus périlleuse du fait de l’accaparement du pouvoir par l’état-major sous le couvert de la défense des intérêts du pays, alors qu’il n’en est rien», observent nos sources qui expliquent la crise actuelle par «une conjonction d’intérêts étroits qui poussent les tenants du pouvoir réel, autrement dit le chef d’état-major et les quelques généraux qui l’entourent, à opérer un coup de force pour imposer un Président qui maintiendra le statu quo».
«Si, dans les années 1990, l’Algérie faisait face au péril extrémiste, en 2019, c’est contre la volonté du peuple majoritaire que le commandement de l’armée se dresse. Cette posture porte en elle le risque d’une double fracture au sein même de l’armée et avec le peuple qui considère l’armée comme une digue devant sa volonté de changement, à cause du comportement autolâtre de son chef actuel», concluent nos sources, non sans exprimer une sérieuse inquiétude quant à l’évolution de la situation en Algérie.
A. S.
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