Brimades et humiliations en présence des caméras : les walis font leur cinéma
Par Mohamed K. – Les vidéos de walis sermonnant et admonestant des chefs de projets en retard et autres fonctionnaires incompétents circulent à foison sur les réseaux sociaux, reprises de couvertures médiatiques assurées par les chaînes de télévision mobilisées pour la circonstance. Ces «rappels à l’ordre» véhéments des walis ne datent pas d’aujourd’hui. Ils interviennent à chaque fois que le pouvoir a besoin de montrer que le gouvernement veille au respect des délais et à la bonne marche des projets et que, surtout, s’il y a manquements, ce n’est sûrement pas la faute des hauts responsables, mais celle des «petits exécutants».
Ces démonstrations, pourtant, ne convainquent pas grand-monde mais cette tradition s’est ancrée dans les mœurs politiques nationales au point où les brimades en direct des petits fonctionnaires et attributaires de marchés locaux par des supérieurs «bienveillants à l’égard de leurs administrés» et soucieux du bon usage des deniers publics sont devenues une sorte de fuite en avant faute de pouvoir justifier les véritables raisons de la gestion catastrophique au niveau des collectivités locales.
Ce «cinéma» a commencé sous Bouteflika, qui semble avoir délégué cette façon de faire aux ministres et aux walis qui ont fait de ses brimades et de ses «orientations avisées» un mode d’emploi. La fausseté de ces visites de terrain agrémentées de blâmes et d’avertissements est révélée par la présence, à chaque fois, des caméras des télévisions publique et privées qui assurent à ces sorties «impromptues» une large couverture, dans l’hypothétique espoir de convaincre les citoyens, désabusés et horripilés par le bricolage et les marchés de complaisance, que la faute revient aux niveaux les plus bas de la responsabilité et jamais à l’administration centrale.
Des présidents d’APC, souffre-douleur des populations irritées par l’absence de développement dans leurs régions, ont pourtant expliqué que le problème réside dans les lois élaborées par le gouvernement et votées par le Parlement. Ils ont notamment pointé la loi sur les appels d’offres qui, dans sa conception aberrante actuelle, oblige les élus locaux à confier les projets au moins-disant, sans se soucier de sa capacité à réaliser le projet dans les délais impartis et conformément au cahier des charges. Ces maires ont souligné que cette approche a fait que les entreprises sélectionnées, non seulement s’avèrent incapables de respecter leur engagement mais obligent le maître d’ouvrage à payer des avenants qui font que le coût final du projet dépasse de loin l’offre du plus-disant pour une qualité moindre.
M. K.
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