Notre position
Par M. Aït Amara – Cette «mise au point» a été rendue nécessaire par les commentaires de lecteurs auxquels nous adressons nos plus vifs remerciements d’être restés fidèles à notre site, en dépit des chimériques tentatives de son musellement qui persistent à ce jour.
Parmi nos lecteurs, certains croient entrevoir un «revirement» dans notre ligne éditoriale. Qu’ils soient rassurés : il n’en est rien. Algeriepatriotique n’a jamais dévié d’un iota de ses convictions, malgré toutes les critiques et les attaques – normales – qu’il subit ; «normales» parce que nous n’avons pas pour habitude de tenir le bâton par le milieu, ni de mitiger nos propos. Cette franchise – parfois même corrosive – nous vaut des retours de flamme que nous considérons comme tout à fait logiques, car nous n’affectionnons pas particulièrement le monologue et la flagornerie. «Je préfère recevoir une mise au point que de m’entendre dire que personne n’a eu cure de ce que j’ai écrit», disait un directeur de rédaction chevronné. Aussi les remarques de nos lecteurs sont-elles les bienvenues.
Avant le 22 février 2019, Algeriepatriotique avait commencé à mettre en garde les citoyens au sujet des appels anonymes qui foisonnaient sur les réseaux sociaux, les incitant à occuper la rue un vendredi après la prière. Ces appels largement relayés faisaient craindre une manipulation des résidus du FIS dont les porte-voix sont plus que jamais actifs à l’étranger. Mais cette crainte, qui sera balayée par l’extraordinaire prise de conscience du peuple algérien mature, n’était pas la seule. Il s’est avéré, dès les premières semaines du Hirak, que celui-ci avait été récupéré par l’ancien chef d’état-major pour régler ses comptes avec une partie du clan auquel il appartenait et qu’il a protégé et parrainé pendant quinze longues années.
Algeriepatriotique, qui avait été jusqu’à décider de sa fermeture en raison des amalgames et des interférences qui faisaient que son maintien pouvait nous impliquer malgré nous dans [leurs] querelles de chapelle, avait dû revenir sur cette décision lorsque des voix malveillantes, corrélées aux milieux de la corruption et à des officines étrangères hostiles à l’Algérie, s’étaient élevées pour crier victoire. Le retour du site était alors devenu une nécessité impérieuse.
Dénonçant les dérives de Gaïd-Salah depuis son déplacement au Val-de-Grâce en 2013 et sa désignation au poste de vice-ministre, dates qui allaient sceller le maintien forcé de Bouteflika au pouvoir fortement adossé au généralissime, le site s’attendait à une vengeance de ce militaire aigri, complexé, narcissique et mégalomane qui a fait de son rang et de sa puissance éphémère un moyen d’écraser tous ceux qui étaient susceptibles de se mettre en travers de son chemin et de gêner ses plans. Algeriepatriotique en faisait partie.
Sur ces entrefaites, le Hirak allait en se renforçant, réclamant un Etat de droit et une nouvelle République. Deux revendications que nous partageons avec les millions de nos concitoyens qui manifestent inlassablement pour mettre fin à ce mode de gouvernance corrompu et archaïque. Nous avons, pour cela, payé le prix cher : blocage du site en Algérie, fermeture de l’entreprise SLC, harcèlement judiciaire, etc. Mais cela fait partie du combat, l’intérêt du pays passant avant le nôtre.
Puis, de semaine en semaine, le pouvoir montrait qu’il n’était aucunement dérangé par le Hirak dans son entreprise politique qui consistait à maintenir le système en l’état, en procédant à des ravalements de façade. Les manifestants qui juraient que l’élection du 12 décembre n’aurait pas lieu se sont réveillés le lendemain avec un nouveau Président «élu» contre leur gré. Quelques jours plus tard, le parrain meurt et des funérailles dignes d’un chef de l’Etat lui sont consacrées, auxquelles même les ambassadeurs étrangers ont été conviés, faisant du mort le véritable Président par intérim – ce que nous avons toujours dit et écrit.
Les manifestants ont, à juste titre, brandi les portraits de l’architecte de la glorieuse Guerre de libération nationale, le martyr Abane Ramdane, lors du 45e vendredi. Ce rappel historique est d’une brûlante actualité. Abane Ramdane, comme Ferhat Abbas et d’autres, était convaincu que la guerre n’était pas une fin en soi, mais un moyen de parvenir à une solution. C’est dans cette perspective qu’il est entré en contact avec l’ennemi dès 1957 pour négocier un accord qui ferait taire les armes, épargnerait des vies et accélérerait le processus de décolonisation.
Aujourd’hui, le Hirak n’a d’autre choix, croyons-nous, que de s’appuyer sur les partis de l’opposition qui l’ont accompagné et lui sont demeurés loyaux depuis le début, pour entamer des pourparlers avec le régime dans les plus brefs délais. Les représentants du Mouvement populaire ne peuvent être issus que de ces formations politiques expérimentées qui représentent l’ensemble des obédiences au sein du Hirak et de l’intérieur de celui-ci, en veillant à écarter les cyber-parasites. Faute de quoi, cet élan patriotique sans précédent sera encore une fois récupéré – et il est en train de l’être irrévocablement – par ces mêmes cercles malintentionnés qui avaient dévié le soulèvement d’octobre 1988 de sa trajectoire pour aboutir aux événements tragiques des années 1990 où les hordes fanatisées voulaient imposer un califat et enterrer la démocratie. Les résidus de ces hordes sont toujours présents. Ils ont juste troqué leur accoutrement pashtoun contre un costume-cravate à l’occidentale et leurs discours ultrareligieux par des sermons odorés à l’encens démocratique.
Oui, le Hirak doit se poursuivre, aussi pacifique et aussi magique, pour peser dans les négociatons. Mais le pays a besoin de retrouver sa stabilité pour faire face à ce qui l’attend. Et ce qui l’attend n’est pas une mince affaire. Il est grand temps de mettre nos rivalités de côté pour une fraternité enfin retrouvée entre tous les Algériens. Sans exclusion, ni rancœur.
M. A.-A.
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