Les Libyens brandissent le drapeau algérien lors de manifestations à Tripoli
Par Kamel M. – Des manifestants libyens ont brandi le drapeau algérien aux côtés de l’emblème de leur pays et de l’étendard amazigh, ce samedi matin à Tripoli, à la veille de l’ouverture à Berlin d’une conférence internationale sur la Libye. Les manifestants ont scandé des slogans hostiles à l’homme fort de l’Est libyen, Khalifa Haftar, qui a mené une offensive contre le sud de la capitale du pays, violant ainsi l’accord de cessez-le-feu qu’il avait accepté avant de revenir sur sa décision sur instigation d’Abu Dhabi.
Les Libyens reconnaissent surtout à l’Algérie son refus de s’immiscer dans les affaires internes de son voisin de l’Est, son soutien actif à tous les efforts de paix à travers le dialogue inter-libyen et son rejet de toute ingérence étrangère. L’Algérie est le seul pays à se tenir à équidistance entre les protagonistes du conflit en Libye, un pays livré à la guerre civile depuis 2011, au lendemain de la chute du régime de Mouammar Kadhafi.
Notre pays a multiplié les initiatives dès le début de la crise libyenne, ouvrant son territoire à l’ensemble des belligérants dans le cadre du dialogue pour aboutir à une sortie de crise rapide. Mais ces efforts ont été balayés par des interférences de pays comme le Maroc ou encore la France qui ont démultiplié les rencontres et les «accords», poussant ainsi d’autres Etats concernés par le dossier libyen à entreprendre, eux aussi, des démarches unilatérales en réponse à ces manœuvres, à l’image de l’Italie et de la Russie. L’enlisement de la crise libyenne a également conduit à l’intervention directe de la Turquie et des Emirats arabes unis qui arment, chacun de son côté, une partie contre une autre, exacerbant ainsi les hostilités et entravant toute démarche pacifique pour mettre fin au calvaire que les Libyens vivent depuis neuf ans.
A Berlin, l’Algérie, par la voix d’Abdelmadjid Tebboune, défendra sa feuille de route initiée à Alger entre 2015 et 2017, qui consiste à inciter les inconciliables parties au conflit à se rasseoir à la table des négociations et à arrêter la guerre voulue par des parties étrangères qui lorgnent les richesses souterraines de ce pays immense et peu peuplé. La position immuable de l’Algérie sera confrontée à celles, plus intéressées, de l’Egypte qui considère la Libye comme son prolongement géographique naturel et qui est un tremplin pour l’emploi au profit de millions de travailleurs égyptiens. La Turquie s’inscrit, elle, dans une logique expansionniste, le sultan d’Ankara rêvant de réhabiliter l’empire ottoman, alors que les Emirats arabes unis adoptent une attitude réactive face à leur frère-ennemi qatari, soutien assumé des Frères musulmans à travers le Moyen-Orient, le Maghreb et ailleurs.
Les puissances occidentales se livrent, quant à elles, une guerre d’intérêts ouverte, l’Italie reprochant à la France d’avoir empiété sur ses plates-bandes, alors que cette dernière s’est autoproclamée «gendarme» de la région depuis l’avènement de Nicolas Sarkozy au pouvoir en 2007.
Les Libyens se tournent donc naturellement vers leur voisin de l’Ouest auquel ils reconnaissent la constance dans ses positions, contrairement au Maroc qui vire sa cuti en fonction des dividendes qu’il peut tirer de la conjoncture. Il l’a démontré encore une fois en envisageant d’abandonner les accords de Skhirat pour mieux tirer profit de la guerre en Libye au gré des changements survenus ces derniers mois.
K. M.
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