La saisie d’un galliforme par la police à Alger prend des allures d’affaire d’Etat
Par Houari A. – Ce qui semblait être une simple saisie anecdotique d’un coq «tapageur» dans le quartier résidentiel d’El-Biar, sur les hauteurs d’Alger, est en train de devenir une véritable affaire d’Etat. La presse mondiale s’est emparée du sujet et ne se prive pas de qualificatifs pour décrire cet «abus de pouvoir». Un citoyen, dont la maison est mitoyenne de celle d’une diplomate occidentale, s’était plaint sur les réseaux sociaux de ce que sa volaille lui a été saisie par cinq policiers arrivés chez lui, sirènes et gyrophares actionnés, pour «embarquer» l’oiseau qui a failli provoquer un grave incident diplomatique. Son propriétaire affirme avoir cherché le coq dans tous les commissariats du secteur, en vain.
Par-delà le caractère loufoque que l’affaire peut revêtir, celle-ci révèle deux faits importants qui font que les médias étrangers les plus sérieux, à l’image de la BBC britannique, s’y soient intéressés. La saisie d’un animal sans avoir obtenu au préalable l’aval de la justice est un grave abus de pouvoir commis par la police, d’autant que la bête, source de la gêne pour la très influente voisine, ne représente aucune menace sur la sécurité publique. L’ordre de procéder à son «enlèvement» semble avoir obéi à une crainte de voir la «diplomate» dérangée dans son sommeil faire parvenir sa doléance aux plus hautes autorités de l’Etat. Le donneur d’ordre ayant, de ce fait, craint de se faire sonner les cloches par ses supérieurs pour ne pas avoir veillé à la tranquillité de l’hôte occidentale dans ces moments d’incertitude où le pouvoir a besoin de se faire reconnaître à l’étranger.
Par ailleurs, l’affaire soulève le problème du mépris avec lequel les autorités traitent les citoyens et leur frilosité dès qu’il s’agit d’un désappointement exprimé par un étranger.
La BBC qui, entre autres médias, s’est emparée du sujet, s’est intéressée aux réactions qui ont suivi cette histoire, en rappelant que de nombreux internautes appellent, depuis, à «la libération du coq», en estimant que «le chant [du coq] n’est pas un crime». Les internautes, souligne la BBC, qui aborde le sujet avec une pointe d’ironie, parle d’«enlèvement» et d’«incarcération» de la bête qui a «laissé derrière lui une poule et sept poussins abandonnés».
De nombreux citoyens ont dénoncé une «énième atteinte» aux libertés, tandis que d’autres insistent sur le fait que la satisfaction des desiderata de la diplomate en question «ne doit pas se faire au détriment des droits du citoyen algérien. Si un cas similaire s’était produit en Italie, l’auteur de l’ordre intimant la saisie du coq aurait été sanctionné. La valeur du citoyen algérien ne doit pas être inférieure à celle du citoyen européen», s’indignent des internautes algériens repris par la BBC.
Bref, une affaire risible devenue politique dont l’Algérie, déjà suffisamment malmenée, aurait pu se passer.
H. A.
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