Les habitants du Sud accusent Zeghmati de les traiter comme des sous-citoyens
Par Houari A. – Le ministre de la Justice, placé à ce poste par l’ancien chef d’état-major de l’armée dont il était l’exécutant obéissant des multiples injonctions, s’est mis à dos à la fois et les magistrats et les citoyens du Grand Sud.
La mutation du procureur près le tribunal de Sidi M’hamed dans une ville éloignée de la capitale sur ordre de Belkacem Zeghmati a provoqué un vent d’indignation chez les magistrats qui dénoncent cette énième atteinte à l’indépendance de la justice. D’autant que la décision intervient quelques jours à peine après le rejet par les juges d’une note émanant du ministère de la Justice, considérée comme une interférence dans le fonctionnement de l’appareil judiciaire.
Il n’est pas exclu que le Syndicat national des magistrats, qui est monté au créneau hier, recoure à nouveau à une grève générale après celle qu’il avait déclenchée voici quelques mois avant de l’arrêter suite à un accord salarial avec la tutelle. Les citoyens avaient cru entrevoir dans le débrayage des magistrats un espoir que les robes noires s’affranchissent enfin de la dépendance par trop criante à l’égard du pouvoir exécutif et de l’ancien homme fort de l’armée qui avait instrumentalisé les tribunaux à des fins éminemment politiques. Mais l’illusion fut courte et les choses avaient repris leur cours «normal» quelques jours plus tard sans que rien n’eût changé, les détenus politiques dont il était souhaité qu’ils fussent libérés ayant été maintenus en détention et d’autres manifestants les ayant même rejoints dans les geôles de Gaïd-Salah.
Mais il n’y a pas que les magistrats qui fustigent la décision de Zeghmati de muter un de leurs collègues dans le Sud pour avoir plaidé la relaxe de prévenus ayant manifesté pacifiquement. Les habitants du Grand Sud n’ont pas accepté que la mutation du magistrat dans une ville de cette région du pays soit considérée comme une «sanction». Les citoyens de cette région, qui se plaignaient déjà de ce que le Sud soit la dernière roue de la charrue dans tous les programmes de développement des gouvernements successifs depuis de longues années et qui se sont opposés avec véhémence au projet d’exploitation du gaz de schiste décidée à Alger, s’indignent à l’idée qu’ils soient perçus comme une pénitence et un châtiment, «comme si nous avions le choléra ou la peste», s’insurgent-ils.
«C’est une injure à nos compatriotes des villes du Sud qui se voient ainsi insultés par un membre du gouvernement», notent des citoyens qui estiment que «cette offense faite à des Algériens qui refusent d’être des sous-citoyens doit être elle-même sanctionnée».
H. A.
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