Les avocats dénoncent l’emprise des services de sécurité sur la justice
Par Nabil D. – Les avocats ont exprimé leur ras-le-bol face à l’instrumentalisation de l’appareil judiciaire par les services de sécurité qui rendent cette institution complètement obsolète. «Nous constatons depuis les premières incarcérations des activistes du Hirak, pour différents délits d’opinion ou autres, que les orientations sont dictées par les services de sécurité», a dénoncé Maître Zoubida Assoul, dans une déclaration à Algeriepatriotique, à l’issue du procès du journaliste Khaled Drareni, mis sous contrôle judiciaire, et des deux militants du mouvement de contestation populaire Samir Benlarbi et Slimane Hamitouche, placés sous mandat de dépôt.
«Les violations multiples du code de procédures civiles et le silence sur les violences commises par les services de sécurité nous laissent penser que le bal est mené par ces services et que la justice ne veille pas sur les libertés et les droits humains comme elle est censée le faire», s’est indignée la présidente de l’Union pour le changement et le progrès (UCP), qui rappelle que la justice est «garante des libertés et droits des citoyens contre toute violation». «Les différents dossiers que nous avons plaidés sont une machination des services de sécurité», a-t-elle fait savoir, en soulignant qu’«il n’y a aucun élément constitutif d’infraction pénale» dans les dossiers des prévenus.
Les avocats avaient organisé un sit-in à la sortie du tribunal de Sidi M’hamed pour appeler encore une fois à l’indépendance de la justice. Maître Mustapha Bouchachi a fustigé les magistrats qui n’appliquent pas la loi mais prononcent leurs verdicts en fonction des ordres qu’ils reçoivent des services de sécurité. L’avocat en veut pour preuve le cafouillage qui a précédé la présentation des trois accusés devant le juge, «après, a-t-il dit, un va-t-et-vient entre le commissariat et le tribunal».
Ce n’est pas la première fois que les avocats protestent contre les décisions arbitraires de la justice et l’emprisonnement illégal de nombreux citoyens sur ordre direct de l’ancien chef d’état-major de l’armée, le général Gaïd-Salah, et de ses fidèles lieutenants toujours aux commandes à ce jour. Les robes noires n’excluent pas de recourir à une action commune sur le plan national pour s’insurger contre cette grave dérive de la justice qui a perdu toute crédibilité ces derniers mois, après qu’elle eut fait preuve d’une inféodation totale à des décideurs tapis dans l’ombre alors qu’elle jouit de prérogatives constitutionnelles qui la prémunissent contre toute injonction et contre toute interférence dans l’exercice de ses fonctions.
N. D.
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