Coronavirus : déçue par l’Europe, l’Italie et se tourne vers la Chine et Cuba
De Rome, Mourad R. – Déçue par la tiédeur du soutien européen en cette période cruciale, l’Italie, qui reste et de loin, le pays le plus fortement touché par le Covid-19 dans le Vieux-Continent, ne cache plus son mécontentement et appelle à une approche consensuelle et équitable pour pouvoir parer au plus urgent.
C’est d’ailleurs le sens des réactions politiques de gauche comme de droite qui appellent le gouvernement de Giuseppe Conte à taper du poing sur la table des discussions à Bruxelles et, surtout, à rappeler sévèrement à l’ordre la gouverneure de la Banque centrale européenne, la Française Christine Lagarde, qui, interrogée sur la défiance autour de la dette italienne, avait irrité les Italiens en soulignant que la BCE n’avait pas comme «vocation première de réduire les différentiels», entre les taux italien et allemand, et ce même en cette conjoncture exceptionnelle.
Une posture jugée méprisante et inacceptable par nombre d’observateurs, qui ont fait noter que le déficit consenti à l’Italie, sur fond de cette pandémie, 25 milliards d’euros, n’était nullement comparable à celui permis à l’Allemagne, plus de 550 milliards d’euros, finissant, selon Il Corriere della Sera, par conforter le camp des eurosceptiques dans leur guerre frontale, et sans merci, contre les institutions financières continentales et dénonçant, sans répit, une gestion européenne à deux vitesses qui, selon eux, affaiblit précisément l’Italie.
Cette déception se traduit clairement sur le terrain de l’assistance médicale et logistique à fournir à ses citoyens, puisque l’Europe apparaît comme étant trop centrée autour de l’axe Paris-Berlin, et l’Italie, pressée de faire vite pour juguler l’avancée du virus, a décidé de voir ailleurs.
Tout d’abord en direction de la Chine, important partenaire de la péninsule, qui a dépêché des tonnes de matériel, des masques et autres gels de désinfection, mais aussi des équipes de médecins qui ont fait leurs preuves et ont permis aux autorités de Pékin de réaliser l’exploit de Wuhan. Ces équipes, qui agissent au niveau de l’hôpital Spallanzani de Rome, ont immédiatement conquis leurs collègues italiens, qui espèrent avec leur concours augmenter le taux de guérison de cette structure, desservant la capitale et la région du Latium.
Une aide très appréciée par l’organisme luttant contre la propagation de ce virus, d’autant qu’elle prévoit une coordination scientifique entre les deux pays qui s’apprêtent à y associer des experts cubains, qui se déplaceront dans les prochains jours en Italie et dont la renommée et l’excellence sont reconnues par tous.
A cet effet, La Havane se dit prête à partager avec l’instance italienne de régulation pharmaceutique le fruit de ses recherches et notamment un médicament qui a été expérimenté avec succès en Chine.
De toute évidence, cette sollicitude, qui, répétons-le, très appréciée en Italie, prouve que le coronavirus, qui continue de sévir un peu partout dans le monde, permet ce genre de paradoxes et favorise involontairement l’avènement de nouvelles alliances, loin des préjugés et de l’ignorance de certains ; les Etats étant pressés par leurs opinions publiques à agir vite et à rechercher l’antidote là où il se trouve, même s’il est fort à parier qu’aucun Italien n’oubliera de sitôt cette main sino-cubaine tendue et arrivée à point nommé.
M. R.
Comment (14)